VAMOS, à la quète de noyaux rares de très basse énergie
 
10 avril 2003



Contact DAPNIA :
L. Nalpas

Le développement des faisceaux radioactifs, comme le dispositif Spiral au Ganil (Caen), permet d'étudier la structure de noyaux instables présentant de grand excès de protons ou de neutrons, et de sonder les propriétés des forces nucléaires loin de la « vallée de stabilité ». Ces faisceaux de basse énergie (quelques centaines de MeV) sont de faible intensité en comparaison des faisceaux stables. Ils nécessitent donc de nouveaux instruments alliant une grande couverture angulaire et une grande efficacité. Vamos est un spectromètre magnétique de grande acceptance spécifiquement conçu dans ce but. Il permet de travailler avec des ensembles de détection complexes (spectromètre gamma, détecteur de particules chargées...) disposés autour de la cible ou au plan focal.

La détection standard au plan focal (100 x 400 mm2) se compose de deux chambres à dérive pour la reconstruction des trajectoires et la mesure de masse, d'une chambre à ionisation et d'un scintillateur « plastique » pour la mesure de l'énergie et l'identification des charges. Pour détecter des ions lourds (Z>10) de basse énergie (inférieure à 2 MeV/nucléon), il est nécessaire d'avoir recours à de nouvelles techniques. En effet, pour éviter de perturber la trajectoire des ions, le matériau actif doit être aussi mince que possible. La détection de l'émission secondaire d'électrons induite par le passage d'ions à travers une feuille mince, couplée à une détection de galettes à micro-canaux, est une technique employée depuis une vingtaine d'années au Ganil. Le recours à une mosaïque de galettes pour couvrir une grande surface utile pose, en revanche, des problèmes de mécanique, de discontinuité, de fragilité et de coût. Ces difficultés nous ont conduits à étudier au Dapnia un dispositif innovant basé sur un détecteur gazeux (Se-D pour Secondary electron Detector).

De bonnes performances ont été obtenues en laboratoire avec une source de californium sur un prototype de petite dimension (70 x 70 mm2). Un détecteur de plus grande taille (140 x 420 mm2) a été testé avec succès sur Vamos en octobre 2002 (voir figures 1 et 2). Le système de détection au plan focal se composait d'un Se-D, d'une chambre à dérive et d'un scintillateur « plastique ». Des mesures de précision spatiale ont été obtenues avec un faisceau direct de germanium (Z = 32) d'une centaine de micromètres de large. Pour ce faire, une mire composée de trous successifs de différents diamètres, montée sur la feuille émissive, a été utilisée. Les précisions obtenues sont respectivement de 1,8 mm et 1,5 mm dans les deux directions (voir figure 3). La précision temporelle est voisine de celle obtenue avec des galettes à micro-canaux (300 ps). Ce test a permis de valider les choix effectués (feuille émissive, dispositif de guidage, détecteur, électronique...) en vue de lancer la fabrication des détecteurs finaux pour Vamos dont la livraison est prévue au printemps 2003.





Figure 1 : Cette image montre le dispositif Se-D monté au plan focal de Vamos. Au premier plan, on aperçoit la mire, derrière laquelle se trouve la feuille émissive, le cadre de la grille accélératrice, le détecteur situé 20 cm plus loin. L'ensemble est placé dans une bobine qui crée un champ magnétique longitudinal dans le volume de dérive des électrons entre la grille et le détecteur. Le dispositif est incliné à 45 degrés par rapport à la direction des ions incidents.
 

Figure 2 : Ce schéma illustre le principe de fonctionnement du Se-D. Les électrons émis par une feuille de mylar métallisée de 0,9 µm d'épaisseur sont accélérés par une grille électrostatique, à une énergie de 10 keV, puis focalisés par un champ magnétique longitudinal vers une chambre fonctionnant à basse pression d'isobutane. L'énergie des électrons est suffisante pour franchir la fenêtre d'entrée du détecteur. Ce dernier est un compteur proportionnel qui présente deux régimes d'amplification : un mode « plaque-parallèle », suivi d'une amplification au voisinage des fils d'anode où règne un gradient de champ élevé. Le gain du détecteur dépend de la tension appliquée sur les fils. Les positions (X et Y) sont obtenues en analysant la répartition des charges induites sur deux cathodes composées respectivement de pistes et de fils. Ces signaux sont lus par des circuits Gassiplex développés au Cern qui, montés par couple sur une carte mère conçue au Sédi, permettent de traiter 32 mesures de position.
 

Positions en mm

Positions en mm
Figure 3 : Sont présentées les images de la mire (dont les trous sont superposés en noir et blanc) obtenues sans et avec champ magnétique. Dans le premier cas (à gauche) nous obtenons une image fidèle mais de pauvre résolution de la grille tandis qu'avec un champ appliqué de 120 gauss (à droite), l'image des trous est déplacée mais de bien meilleure résolution. La focalisation verticale et les déviations visibles au voisinage des bords de la mire résultent des inhomogénéités du champ magnétique qui devront être pris en compte lors de l'analyse des données.
 

Figure 4 : L'équipe du projet Se-D :
E.C. Pollacco, A. Drouart, M. Riallot, Ph. Bourgeois, L. Nalpas, E. Bougamont, C. Mazur.