03 septembre 2009
Les trajectographes TPC de l’expérience T2K au Japon se préparent à détecter des neutrinos

 

Les équipes d'ingénieurs et de physiciens de l'Irfu ont réussi l'intégration de deux grandes chambres, permettant de reconstruire les traces de particules chargées. Ces chambres caractériseront le faisceau de neutrinos de l'expérience T2K (Tokai to Kamiokande). Ce sont les premières grandes chambres TPC équipées de détecteurs de type micro-structure (Micromegas). La surface de détection de l'ensemble est très importante (presque 9m²) et le nombre de canaux d'électronique en proportion (124000). L'Irfu a réalisé l'ensemble du système de détection des trois grandes chambres à échantillonnage temporel (TPC), comprenant 72 détecteurs Micromegas et toute l'électronique frontale. Une nouvelle puce (AFTER) et deux cartes électroniques, permettant de transmettre au système d'acquisition les signaux numérisés à travers un ensemble de 72 liens optiques gigabit ont été spécialement conçues par les ingénieurs du SEDI (service d'Electronique des Détecteurs et d'Informatique). Avant leur installation au Japon dès cet  automne, les deux chambres ont été testées, à TRIUMF (Canada), en février et juin. 

 

 

Les premiers tests en faisceau et avec des rayons cosmiques ont permis de reconstruire des traces avec la précision de l'information attendue. Il s'agit d'un jalon important dans la réalisation d'un détecteur clé pour l'expérience T2K.

 

Objectif de l'expérience

 

Située à Tokaï au Japon, cette expérience a pour objectif la mesure de plusieurs paramètres liés aux oscillations des neutrinos. Les trois types de neutrinos, associés à l'électron, au muon et au tau, partagent une propriété surprenante : chaque neutrino passe sans cesse d'un type à l'autre au fil du temps : on dit que les neutrinos oscillent. La probabilité qu'un neutrino de saveur donnée se transforme en un neutrino d'une autre saveur dépend de la valeur absolue de la différence entre les carrés des masses des neutrinos (Δm2), de l'énergie (E) du neutrino, ainsi que d'un paramètre appelé « angle de mélange ». Dans le cas de trois saveurs, on a deux différences de masse et trois angles de mélange.

L'expérience T2K a été conçue pour étudier en détail les oscillations des neutrinos-mu venant de la désintégration des pions issus de l'interaction du faisceau de protons (de l'accélérateur JPARC à tokai) dans une cible adéquate.

Deux des angles de mélanges sont connus avec une bonne précision. Le troisième angle, appelé θ13 reste mal connu. On sait seulement qu'il est faible. Sa mesure est l'objectif principal de l'expérience T2K avec une précision dix fois meilleure que les limites actuelles.

De plus, si la valeur du paramètre θ13 se révélait non nulle, un nouveau champ de recherche serait ouvert sur la compréhension de l'origine de la matière dans notre Univers car cet angle est relié à la violation CP (symétrie permettant de passer d'une particule à une antiparticule) dans le secteur leptonique.

 

Principe de l'expérience

 

Un faisceau de neutrinos-mu d'énergie d'environ 600 MeV est préparé à JPARC, nouveau laboratoire japonais de physique des particules. Ce faisceau est dirigé vers le détecteur Super-KamiokaNDE (d'où l'acronyme de l'expérience T2K : « Tokai to Kamioka ») situé à environ 300km de la source. L'expérience est basée sur la recherche de l'apparition de neutrinos-e dans Super-KamiokaNDE, liée à l'angle de mélange θ13. Un détecteur proche est chargé de caractériser les faisceaux de neutrinos avant oscillation en mesurant les traces produites par les neutrinos qui  interagissent avec des cibles placées dans un champ magnétique. L'Irfu, avec le SPP, le SEDI et le SIS, est fortement engagé dans la construction de l'expérience T2K en participant, notamment, à la réalisation des 3 chambres à projection temporelle (TPC) équipant ce détecteur proche. Avant leurs installations au Japon dès cet été, les trois chambres ont été assemblées et testées, à TRIUMF (Canada) avec un faisceau de pions, muons et électrons et des particules cosmiques.

 

 

 
Les trajectographes TPC de l’expérience T2K au Japon se préparent à détecter des neutrinos

Figure 1. Une des trois TPC (chambres à échantillonnage temporel) qui formeront le détecteur proche de T2K chargé de caractériser le faisceau de neutrinos.

 

  

Caractéristique du Trajectographe

  

Dans le cadre du détecteur proche de T2K, l'Irfu réalise l'ensemble du système de détection des trois grandes chambres à échantillonnage temporel1 (TPC), avec notamment 72 détecteurs Micromegas et toute l'électronique frontale (figures 1 et 2). Ce sont les premières grandes TPC équipées de détecteurs de type micro-structure. La surface de détection de l'ensemble est très importante (presque 9m²) et le nombre de canaux d'électronique en proportion (124000). Elle pourrait servir de modèle à d'autres expériences à venir comme celle sur l'ILC.  Une attention particulière a été portée à la qualité des détecteurs, avec une série de tests tout le long de la fabrication. Tous les Micromegas sont calibrés à l'antenne Irfu au CERN avec une source de 55Fe. La qualité de ces détecteurs est excellente, avec une uniformité de la réponse meilleure que 3%.

L'électronique frontale conditionne et numérise le signal temporel de chaque élément de détection (pad). Cela permet de reconstruire en trois dimensions (deux coordonnées issues de la position du pad et la troisième déduite du temps de dérive) les traces qui traversent le volume gazeux de la TPC. Pour cela, l'équipe du Sédi a conçu une nouvelle puce (AFTER) et deux cartes électroniques, pour transmettre au système d'acquisition les signaux numérisés à travers un ensemble de 72 liens optiques gigabit

 
Les trajectographes TPC de l’expérience T2K au Japon se préparent à détecter des neutrinos

Figure 2. Electronique frontale des 12 modules Micromégas, ainsi que la mécanique de refroidissement conçue par le SIS.

Les trajectographes TPC de l’expérience T2K au Japon se préparent à détecter des neutrinos

Figure 3.

 

Reconstruction des particules chargées

 

Ces tests avec des rayons cosmiques (figures 3 et 4) ont montré de bonnes performances en termes de gain, de stabilité et de résolution spatiale. Ces performances permettront d'atteindre la précision de mesure de l'impulsion des particules attendue dans le détecteur "proche" de T2K, soit 8 % à 1 GeV/c. En particulier, une résolution spatiale de 600 μm et une résolution de 6% sur la mesure de l'ionisation ont été démontrées.

 

Prochaine étape

 

Les deux TPC ont été testées avec succès à TRIUMF. Ces détecteurs seront installés au Japon à JPARC pour être prêts à fonctionner pour la prise des données à partir de l'automne. Les premiers résultats de physique, et en particulier ceux qui vont mesurer ou contraindre θ13 sont attendus avec impatience par la communauté internationale et devraient arriver à l'été 2010.

Contacts :

Alain DELBART(SEDI)

Marco ZITO(SPP)

 

1.Une chambre TPC (Time Projection Chamber)  est capable de fournir une image 3D du passage d'une particule chargée à partir de l'ionisation déposée dans le volume de gaz enfermé dans la chambre

 
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Figure 4.

#2625 - Màj : 17/03/2010

 

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