L’environnement joue un rôle fondamental dans la formation et l’évolution des galaxies. Dans l’univers proche, les effets environnementaux se manifestent par l’apparition de correlations entre les proprietés des galaxies et leur densité locale. Toutefois l’importance de l’environnement dans la régulation des processus d’évolution des galaxies, comme la formation d’étoiles et son arrêt, l’enrichissement en éléments lourds du gaz et des étoiles, l’activité nucléaire et les transformations morphologiques, est toujours débattue. De plus, les difficultés liées à l’observation sont exacerbées par l’évolution temporelle corrélée des galaxies et de l’univers lui-même et par l’absence d’une définition univoque d’environnement. Le changement profond des structures cosmiques en fonction du redshift défie toute interprétation basée uniquement sur l’observation de l’univers proche, celle-ci ayant tendance à cacher l’origine physique des correlations observées. En conséquence l’étude de l’univers lointain, à une époque où le taux de formation stellaire était plusieurs fois plus élevé qu’aujourd’hui et les galaxies formaient la majorité de leur masse, devient donc un outil crucial pour comprendre quand et comment l’environnement a commencé à exercer ses effets. Dans cette optique, l’objectif de cette thèse est d’approfondir notre compréhension de l’action de l’environnement sur l’évolution des galaxies à l’époque du pic de formation stellaire dans l’univers, à redshift z  2. En particulier, je présenterai une analyse détaillée de l’amas de galaxies détecté en rayons X le plus distant connu actuellement, CL J1449+0856 à z = 1.99. Une population de galaxies rouges, massives et passives occupe le centre de cet amas. Cet aspect et la présence d’émission de rayons X par le milieu intergalactique sont typiques des amas massifs et bien développés observés dans l’univers proche. De plus, ces proprietés constituent une différence remarquable entre CL J1449+0856 et les ancêtres des amas (proto-amas) à plus haut redshift, typiquement plus dispersés et principalement composés de galaxies formant activement leurs étoiles. Dans un premier temps, je montrerai les résultats d’une campagne d’observation spectroscopique des galaxies actives dans CL J1449+0856, réalisée au télescope Subaru avec l’instrument MOIRCS. En combinaison avec une base de données photometriques et spectroscopiques d’archive, en particulier provenant du télescope spatial Hubble, je caractériserai les conditions physiques du milieu interstellaire de ces galaxies où la formation d’étoiles chauffe le gaz et provoque l’émisvi sion de raies observées dans les spectres infrarouges. En moyenne les galaxies de l’amas montrent un rapport de raies [N ii]/H significativement plus bas et une largeur de raie H équivalente plus haute que des objets de même masse n’appartenant pas à l’amas. Cependant, ni le rapport [O iii]/H ni le parametre d’ionisation ou le rapport N/O ne sont différents entre galaxies d’amas et de champ. En conséquence, ces observations peuvent être interprétées comme étant dues à une pauvreté en metaux dans les galaxies d’amas suite à l’accumulation de gaz primordial ou peu enrichi en éléments lourds. De plus, l’enrichissement en gaz primordial peut expliquer les valeurs de largeur de raie H équivalente, dans la mesure où cela peut déclencher la formation de nouvelles étoiles. Finalement, je présenterai deux scenarios alternatifs et complémentaires liés à l’environnement local ou à grande échelle pour justifier l’accumulation de gaz dans les galaxies d’amas. Les réservoirs de gaz dans CL J1449+0856 sont le sujet d’un deuxième projet que je discuterai. Dans cette thèse je présenterai les résultats de nouvelles observations de l’amas avec le filtre étroit NB3640 installé dans l’instrument LRIS au télescope Keck. À l’origine, le projet prévoyait de détecter la raie Ly émise par des galaxies individuelles dans l’amas. À notre étonnement, les données révèlèrent une émission Ly étendue sur 100 kpc dans le coeur de l’amas. La taille et la luminosité de cette émission sont telles que nous pouvons lui appliquer la définition de “nébuleuse géante Ly ”, une classe d’objets mystérieux que la communauté des astrophysiciens étudie à ce jour attentivement. Cette découverte confirme l’existence d’une connexion entre les nebuleuses géantes et les environnements denses à haut redshift et montre que cette relation est valide aussi dans le coeur ultradense d’un amas bien formé. Ce qui est fascinant, c’est la présence simultanée de plasma extrêmement chaud et visible par rayons X et de gaz plus froid émettant la raie Ly . D’un côté, cette situation rassemble à ce qui est observé dans les regions centrales des amas dits “cool-core” à bas redshift, où le refroidissement du plasma intergalactique induit des instabilités thermiques et génère l’emission Ly dans de longs filaments gazeux. D’un autre côté, je montrerai que les proprietés physiques de la nebuleuse dans CL J1449+0856 sont incompatibles avec un scenario où ce système peut être conçu comme une variante plus puissante des filaments ionisés dans les amas cool-core. De plus, des mécanismes alternatifs sont nécessaires pour expliquer la luminosité Ly observée. Dans ce cas, soit les photons ionisants émis par deux noyaux galactiques actifs dans l’amas, soit des ondes de choc dues aux vents galactiques peuvent générer cette émission. En poursuivant l’analyse, je discuterai les processus qui règlent l’évolution temporelle de la nebuleuse géante et je conclurai que l’interaction entre le plasma chaud et tiède est responsable de l’évaporation vii viii du gaz à temperature plus baisse. Ainsi, en excluant la possibilité d’une heureuse coïncidence, un réapprovisionnement constant de gaz froid est indispensable pour justifier l’existence de cette nebuleuse. Ensuite j’explorerai la possibilité que les galaxies de l’amas constituent une source de gaz suffisante pour soutenir cette nebuleuse. Je déduirai la quantité de gaz expulsé par les galaxies suite à l’instauration de vents galactiques dus à l’explosion de supernovas ou à la croissance de leurs trous noirs super-massifs, et je montrerai que cela suffit à maintenir la stabilité de la nebuleuse. De plus, je déterminerai que la quantité d’énergie cinétique liée aux vents galactiques est suffisante pour chauffer le milieu intergalactique et augmenter son entropie, comme prédit par les simulations cosmologiques et requis par les proprietés physiques du plasma chaud dans les amas de l’univers proche. Finalement, j’introduirai les nouveaux projets sur lesquels j’ai travaillé pour développer les sujets discutés ci-dessus. En particulier, j’ai dédié une fraction importante de mon travail de thèse à la rédaction de demandes d’observation auprès des principaux télescopes existants. Je discuterai des demandes acceptées et celles en attente d’une réponse, concernant l’identification de nouveaux amas de galaxies à haut redshift et de leur caractérisation spectroscopique, et la recherche de nebuleuses géantes d’émission Ly dans leurs coeurs.