L’anneau de gaz géant du Lion formé lors de la collision de deux galaxies
Une équipe internationale menée par des astrophysiciens de l’Observatoire de Lyon (CRAL, CNRS/INSU, Université Lyon 1) et du laboratoire AIM (CEA-Irfu,CNRS,Université Paris 7) vient de lever le voile sur l’origine de l’anneau de gaz géant du Lion. Les astrophysiciens ont pu détecter une contrepartie optique à ce nuage qui correspond à des étoiles en formation avec le télescope Canada-France-Hawaii (INSU-CNRS, CNRC, U. Hawaii). Par le biais de simulations numériques réalisées sur les supercalculateurs du CEA, les chercheurs ont ensuite proposé un scénario de formation de cet anneau. Il s’agit d’une violente collision entre deux galaxies. Ils ont pu identifier les coupables et dater l’impact. Cette découverte permet donc d’affirmer que ce gaz n’est pas primordial, mais bien d’origine galactique. Ces travaux sont publiés dans la revue Astrophysical Journal Letters.
Gaz froid et primordial
Dans les théories actuelles de la formation des galaxies, l’accrétion de gaz froid et primordial est un processus majeur pour les premières étapes de la croissance des galaxies. Ce gaz primordial présente deux caractéristiques majeures : il n’a jamais séjourné dans les galaxies et n’a pas satisfait les conditions pour former des étoiles. Une des questions actuelles est de savoir si ce processus est encore à l’œuvre aujourd’hui dans les galaxies proches.
L’anneau du Lion, un anneau géant de gaz froid entourant les galaxies du groupe du Lion, est un des exemples les plus spectaculaires et mystérieux de nuages de gaz intergalactiques. Depuis sa découverte dans les années 80, son origine et sa nature sont controversées. Les nouvelles observations viennent de lever le voile.
Grâce à la sensibilité de la caméra MegaCam, installée au foyer du télescope Canada-France-Hawai (CFHT), l’équipe de chercheurs a obtenu pour la première fois des observations d’une contrepartie optique des régions les plus denses de l’anneau. Cette lumière est émise par des étoiles massives jeunes, ce qui apporte la preuve que ce gaz est en situation de former des étoiles. Un anneau de gaz et d’étoiles entourant une galaxie fait immédiatement penser à une autre sorte d’anneau, les anneaux dit collisionnels car formés dans la collision de deux galaxies, et dont le plus célèbre exemple est l’anneau d’étoiles dit de la charrette. Est-ce également le cas pour l’anneau du Lion ?
Simulation numérique d’une collision frontale
Pour valider cette hypothèse, les chercheurs ont ensuite utilisé des simulations numériques (calculées sur les super-ordinateurs du centre de calcul du CEA) pour montrer que cet anneau était le fruit d’une collision géante entre deux galaxies du groupe : lors de la collision le disque de gaz d’une des galaxies est véritablement soufflé et va ensuite former un anneau à l’extérieur de la galaxie.
Grâce à ces simulations , les chercheurs ont également pu identifier les galaxies responsables de cette collision : il s’agit des galaxies NGC 3384, une des galaxies centrales du groupe et M96, une galaxie spirale massive située dans sa périphérie (voir image ci-dessus). Les simulations, en retracant la formation de l’anneau, ont permis de dater l’impact : il y a un peu plus d’un milliard d’années.
Ces travaux permettent donc d’affirmer que le gaz de l’anneau géant du Lion n’est pas primordial. La chasse au nuage de gaz primordial reste donc ouverte.
Simulation numérique de la formation de l’anneau géant de gaz du Lion résultant de la collision des deux galaxies, NGC 3384 et M96.Le bleu représente le gaz, le jaune/blanc les étoiles. L’échelle de temps indiquée en bas à droite montre qu’après un milliard d’années, la structure et la taille de l’anneau sont correctement reproduites. Crédit: Observatoire de Lyon et laboratoire AIM. (si la vidéo n’apparait pas, cliquer ici).
Contact : Pierre-Alain Duc (CEA)
Publications :
« A collisional origin for the Leo ring»
Michel-Dansac L. (1), Duc P.A. (2), Bournaud F. (2), Cuillandre J.C. (3), Emsellem E.(1), Oosterloo T. (4), Morganti R. (4), Serra P. (4), Ibata R. (5), Astrophysical Journal Letters, 717 (2010) L143-L148, pour une version electronique arXiv:1005.4208
(1) Centre de Recherche Astronomique de Lyon (CRAL : CNRS, Université de Lyon 1, Ecole Normale Supérieure de Lyon, Observatoire de Lyon-INSU),
(2) laboratoire « Astrophysique, Instrumentation et Modélisation (AIM : Université Paris Diderot, CNRS, CEA),
(3) Télescope Canada-France-Hawaii (INSU-CNRS, CNRC, U. Hawaii),
(4) ASTRON, Netherlands Institute for Radio Astronomy,
(5) Observatoire Astronomique de Strasbourg (INSU-CNRS)
Voir : le texte du communiqué de presse CNRS/INSU-CEA
Le communiqué de presse du CFHT – Press release from CFHT (en anglais)
Voir également : – « Existe-t-il des galaxies sans étoiles » , Novembre 2007