Des aimants cosmiques permanents
Des chercheurs du Service d’Astrophysique du CEA-Irfu et de l’Université de Bonn (Allemagne) viennent de démontrer l’existence de champs magnétiques stables dans les régions non convectives des étoiles comme les couches externes des étoiles plus massives que le Soleil ou le cœur des étoiles de type solaire. Dans ces régions, l’absence de forts mouvements de convection et de l’effet « dynamo » associé ne peut régénerer le champ magnétique. Grâce à des modèlisations en 3D du champ interne, les scientifiques ont ainsi confirmé que des champs à structure complexe « torsadée » pouvaient rester stables sans se détruire sur des durées comparables à la vie de l’étoile. Ce résultat très important permet de mieux comprendre le rôle du champ magnétique dans l’évolution des étoiles et notamment l’origine des très forts champs magnétiques observées dans les objets compacts (naines blanches et étoiles à neutrons), produits à la fin de la vie des étoiles. Ces études font l’objet de deux publications dans les revues Astronomy & Astrophysique et Astrophysical Journal.
Un magnétisme de surface dépendant du type d’étoile
Selon la masse d’une étoile et également son stade d’évolution, le champ magnétique de surface a un aspect très différent. Dans le cas des étoiles de faible masse, le champ magnétique varie ainsi selon un cycle fortement corrélé à la vitesse de rotation de l’étoile. C’est le cas du Soleil, considérée dans la Galaxie comme une étoile de faible masse, pour lequel le champ magnétique varie selon un cycle de 11 ans (22 ans pour un cycle complet) qui se traduit par l’apparition et la disparition de nombreuses taches à sa surface.
En revanche, dans les étoiles de masses plus grandes on observe que le champ magnétique est beaucoup plus stable, constant sur de très longues durées et très peu corrélé avec la rotation et les propriétés générales de l’étoile. Cette différence majeure réside dans la structure très différentes des astres.
Dans les étoiles de faibles masses, le magnétisme observé est celui généré dans des couches externes dites « convectives » où de forts mouvements de matière sont produits, analogues au bouillonnement de l’eau dans une casserole. Ces mouvements d’un fuide conducteur produisent alors un champ magnétique par l’effet dynamo.
Dans les étoiles de plus grandes masses, cette zone convective n’existe pas et pourtant on observe bien à la surface un champ magnétique stable.
Un champ en pelote
Pour être stable sur de longues échelles de temps, sans effet dynamo, les scientifiques ont démontré que le champ magnétique devait avoir une géométrie complexe avec une configuration « torsadée » c’est à dire avec des composantes différentes dans le plan méridien de l’étoile et dans le plan orthogonal, lui donnant l’aspect « d’une pelote de ficelle ». Au laboratoire, de tels champs stables sont crées dans les expériences, notamment dédiées à la fusion par confinement magnétique comme le projet ITER actuellement en construction.
Grâce aux modéles en trois dimensions calculées par les chercheurs du Laboratoire Dynamique des Etoiles et de leur Environnement (LDEE) du Service d’Astrophysique du CEA/IRFU et l’Université de Bonn (Allemagne), il a pu etre démontré que ces champs étaient bien stables sur de très longues durées. Ils apparaissent comme des champs « fossiles » ancrés dans les étoiles. Un programme d’observation d’étoiles massives, réalisé dans les observatoires du Pic de Midi (France) et Canada-France-Hawaii (CFH, Hawaii,USA), a pu vérifier que ces configurations calculées correspondaient bien à celles du champ magnétique observé à la surface des étoiles.
Ce résultat permet maintenant aux astrophysiciens de réaliser une modélisation réaliste et cohérente des champs magnétiques dans les régions non convective des étoiles. Il est particulièrement important pour comprendre également la source et le comportement des champs magnétiques au coeur des étoiles denses de la Galaxie. Ces objets compacts (naines blanches ou étoiles à neutrons), résultent de l’effondrement d’un coeur stellaire à la fin de la vie d’une l’étoile. Leur champ magnétique provient du piégeage du flux magnétique lors de l’effondrement, il est donc directement relié au champ fossile de l’étoile dont ils sont issus.
Contact : Stéphane MATHIS
« On the stability of non force-free magnetic equilibria in stars »V. Duez, J. Braithwaite, S. Mathis
publié dans The Astrophysical Journal Letters, Volume 724, Issue 1, pp. L34-L38 (2010),
pour une version électronique fichier PDF « Relaxed equilibrium configurations to model fossil field I-A first family »
V. Duez, S. Mathis
publié dans Astronomy & Astrophysics, Volume 517, pp. A58 (2010),
pour une version électronique fichier PDF
voir aussi
«Effect of a fossil magnetic field on the structure of a young Sun»
pour une version électronique fichier PDF
Voir également : – « Astérosismologie et activité magnétique « (26 aout 2010)
– « Le nouveau cycle solaire est arrivé » (8 novembre 2009)
Rédaction: S. Mathis, J.M. Bonnet-Bidaud