01 mars 2007
L'astronomie à l'assaut des pôles
Première expérience et projets en Antarctique (1 Mars 2007)

L'expérience GIVRE, développée avec la contribution du CEA/DSM/DAPNIA, vient d'atteindre la station polaire Concordia à l'issue d'un voyage de plusieurs mois en avion, bateau puis traineau jusqu'au centre du contient antarctique. Déjà mis en service, l'instrument est destiné à étudier les conditions draconiennes (très basses températures, givre,..) qui règnent près du pôle Sud. Il est le prélude à des projets astronomiques plus ambitieux comme la création d'un observatoire dans l'infrarouge lointain (60 à 500 micromètres). L'altitude de la station Concordia (3000 m), son climat froid, sec et stable en font un site potentiellement remarquable pour la qualité de son atmosphère à ces longueurs d'onde. Dans le cadre de l'Année Polaire qui vient de débuter le 1 Mars 2007, le Service d'Astrophysique (SAp), associé au réseau européen ARENA (Recherche Antarctique un Reseau Européen pour l'Astrophysique), étudie l'installation d'un grand télescope (>10 m) pour l'infrarouge lointain à Concordia. Dans un premier temps, une caméra infrarouge "CAMISTIC", issue des techniques spatiales, mesurera la transparence de l'atmosphère. Tous ces projets seront discutés lors d'un atelier "Astronomie dans l'Infrarouge lointain depuis l'Antartctique" organisé du 23 au 25 juin 2007 à Saclay.

 

L'expérience GIVRE

Depuis début 2007, le DAPNIA (Service d'Ingénierie des Systèmes et Service d'Astrophysique), le Laboratoire Universitaire d'Astrophysique de Nice (LUAN) et l'Institut Paul Emile Victor (IPEV) sont présents à la station Concordia pour étudier le givre sur les instruments d'optiques destinés à être utilisés pendant la nuit polaire. Pour cette étude, des méthodes de nettoyage par réchauffage, soufflage et traitement des surfaces ont été mises au point afin de protéger les instruments qui utiliseront ce site exceptionnel pour sa très basse température et son taux d'humidité très faible.
Des surfaces de différentes formes et des cellules de mesures ont été placées à quelques mètres au dessus de la neige et seront installées ensuite en haut d'une tour de 30 mètres, au dessus de la couche d'inversion, pour étudier les effets dans l'atmosphère.

 

 

Givre Givre Tour
Les détecteurs de GIVRE sont constitués de surface de différentes formes et compositions qui sont placés au sol et au sommet d'une tour de 30 m de haut. Malgré l'ensoleillement, on distingue l'important dépôt de givre provoqué par l'altitude et les très basses températures. Cliquer pour agrandir. Crédits SAp/LUAN/IPEV
 

Dôme C, le nouvel Eldorado

L'astronomie de l'infrarouge lointain (60 à 500 micromètres) est la technique d'observation principale pour étudier la naissance et les phases précoces de nombreux objets astrophysiques. Dans ces longueurs d'onde, un obstacle majeur est l'atmosphère et surtout la quantité de vapeur d'eau le long de la ligne de visée du télescope. Celle-ci absorbe le rayonnement cosmique et ne le transmet que dans des "bandes spectrales", véritable fenêtres atmosphériques d'observation sur l'Univers. Pour s'affranchir des effets de la vapeur d'eau (absorption et fluctuation), les observations dans ce domaine ne peuvent êtres effectuées qu'à partir de sites aux climats froids, secs et stables ou dans l'espace. Les hauts plateaux du Chili offrent actuellement des conditions à la fois favorables et facilement  accessibles sur Terre. La teneur en vapeur d'eau dans l'atmosphère y est souvent inférieure à 1 mm. De nombreux observatoires internationaux comme l'Observatoire austral européen (ESO) sont déjà au Chili. L'interféromètre ALMA pour l'astronomie (sub)millimétrique est en construction sur le haut plateau de Chajnantor à 5100 m. 
Cependant ce site n'offrira pas des conditions régulières d'observation dans l'infrarouge lointain (<500 microns). A cause d'une quantité de vapeur d'eau rarement inférieure à 0.5 mm, l'infrarouge lointain n'est accessible que moins de 30% du temps d'observation hivernal. Au contraire le site de Concordia offrirait un gain considérable à 350 et 450 microns avec 90% du domaine spectral accessible pendant l'hiver austral. Cela est dû aux conditions géographiques et climatiques extrêmes : l'altitude, le faible ensoleillement, l'isolement par le courant océanique circumpolaire et le pouvoir réfléchissant de la glace font de ce continent le plus froid de tous. Enfin paradoxalement, il neige très peu en Antarctique. Les dépressions atmosphériques pénètrent difficilement à l'intérieur et l'essentiel des précipitations se produit sur les côtes. L'intérieur du continent est un véritable désert : sur une superficie de 5 millions de km, il tombe chaque année moins de 5 cm d'équivalent en eau et souvent moins de 2 cm. Cela se traduit par une quantité de vapeur d'eau souvent inférieure à 0.2 mm pendant l'hiver.

 
Atmosphère Transparence

A gauche : Transmission de l'atmosphère pour différentes concentrations de vapeur d'eau (PWV) sur le site de Chajnantor au Chili. A partir de PWV<0.2 mm, les fenêtres d'observation pour l'infrarouge lointain s'ouvrent raisonnablement. La courbe en noir représente la transmission atmosphérique attendue à Concordia avec un PWV=0.2mm pour 25% du temps d'hiver. La courbe rouge représente la transmission à Chajnantor avec PWV=0.5 mm pour 25% du temps d'hiver. Le gain est évident à Concordia en dessous de 500 microns jusqu'à 200 microns. A droite : Fréquence d'ouverture de la fenêtre à 450 microns pour Concordia (bleu) et Chajnantor (rouge). Des observations à 450 microns seraient régulières à Concordia pendant l'hiver. Documents Minier et al. 2007 (document PDF). Cliquer sur les images pour agrandir.

 

La mesure de la qualité du site

Au vu de la qualité du site, la base Concordia pourrait à terme recevoir une antenne du même type que celles développées pour le grand réseau ALMA au Chili. Dans un premier temps, le Service d'Astrophysique développe une caméra sensible, CAMISTIC, qui mesurera la transparence de l'atmosphère à Concordia pour l'infrarouge lointain. Cette caméra sera bâtie à partir de détecteurs révolutionnaires, du même type que ceux réalisés par le CEA pour le télescope spatial Herschel. Il s'agit d'une matrice de bolomètres, un réseau de micro-détecteurs convertissant l'énergie de la lumière en  chaleur. CAMISTIC sera installée sur le télescope IRAIT (Télescope Robot International pour l'Antarctique), un petit télescope robotisé, qui devrait entrer en activité prochainement à Concordia. 
 
IRAIT telescope Bolomètres

A gauche : le télescope italien IRAIT à Pérouse avant son départ pour Dôme C. A droite : matrice de bolomètres développée par le CEA (SAp/DSM) et Léti/DRT) pour l'instrument PACS sur l'observatoire spatial Herschel de l'ESA qui fonctionne également au sol. 

 

Le Service d'Astrophysique et l'Astronomie à Concordia

Le Service d'Astrophysique (SAp) est associé au réseau européen ARENA (Recherche Antarctique un Reseau Européen pour l'Astrophysique), coordonné par le Laboratoire Universitaire d'Astrophysique de Nice (LUAN) à Nice. Le but de ce réseau est de renforcer et de structurer les laboratoires européens qui désirent s'impliquer dans le développement d'un observatoire astronomique à Concordia, la base Franco-Italienne à Dôme C en Antarctique. Le SAp est en charge de l'activité du réseau «  Nouvelles fenêtres d'observation dans l'infrarouge lointain ». Dans le cadre d'ARENA, le SAp organise à Saclay en juin 2007 un Atelier sur un futur observatoire dans l'astronomie infrarouge lointain à Concordia.

 

ConcordiaImage futuriste de
l'Observatoire submm/infrarouge
à Concordia
(montage photograhique)

 

 

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Contact :     /  /  

Publication :

" Submillimetre/TeraHertz Astronomy at Dome C with CEA filled bolometer array "
V. Minier, G. Durand, P.-O. Lagage, M. Talvard, T. Travouillon, M. Busso, G. Tosti R.
pour une version électronique (voir astro-ph/0702480 et fichier PDF- 0.46Mo)


Rédaction: V. Minier, J.M. Bonnet-Bidaud

 

 
#1429 - Màj : 01/03/2007

 

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