La production de neutrinos et l'énigme des neutrinos solaires
Sylvaine Turck-Chièze

La production d'énergie par interaction faible entre deux protons est accompagnée d'une transformation d'un proton en neutron avec émission de neutrino. Réaction fondamentale dans le processus de fusion, le nombre de neutrinos ainsi produits se déduit directement de la luminosité totale et de l'énergie produite lors de la transformation de 4 protons en hélium. 65 milliards/cm2 et /s de neutrinos arrivent sur terre en permanence. Dès les années 60, Pontecorvo a immédiatement vu l'intérêt de détecter ces particules mystérieuses. Malheureusement leur énergie est faible (inférieure à 0.4 MeV) et leur détection ne peut être aujourd'hui que partielle. Dans les détecteurs au gallium, ils représentent 60% des neutrinos accessibles. Heureusement, d'autres réactions produisent des neutrinos plus énergétiques. Les plus faciles à détecter, car leur énergie peut atteindre 14 MeV, sont les neutrinos émis par la réaction 7Be +p -> 8B*-> 2 4He + nue. Par contre leur flux est 10000 fois plus faible et leur dépendance en température est très élevé, T 24 au centre du Soleil. Leur flux est donc fortement dépendant des conditions centrales du Soleil, car ils sont émis très près du centre du Soleil. Ces neutrinos sont très intéressants pour mieux comprendre le soleil ou (et) le neutrino. Pendant près de 40 ans, l'estimation théorique du nombre de neutrinos émis fut supérieure au nombre de neutrinos détectés par les différentes installations, et pour certaines d'un facteur 2 à 3. Ce constat fut très stimulant car le Soleil étant une référence pour l'ensemble des étoiles, il était important de chercher s'il y avait un problème dans cette estimation. A côté des progrès que ce questionnement a provoqué en physique fondamentale, l'héliosismologie stimula un calcul quantitatif et valida les différentes hypothèses et ingrédients du calcul. Elle permit de converger vers une prédiction étayée par les mesures sismiques (voir figure 1). L'héliosismologie a permis aussi d'écarter des hypothèses émises pour réduire significativement certains flux, comme un mélange des espèces dû à une convection centrale ou comme la présence de WIMPS (particule candidate pour la matière noire) au coeur du Soleil... Chaque processus, introduit dans les modèles théoriques, a pu être testé à quelques % près et finalement, il est possible de déterminer précisément le flux de neutrinos émis par chaque réaction et d'en déduire le flux prédit pour chaque installation.

 
La production de neutrinos et l'énigme des neutrinos solaires

fig 1 : Evolution du flux prédit pour le détecteur historique de R. Davis : Homestake.
En blanc les prédictions de J. Bahcall, en rouge celles de Saclay, utilisant les mesures sismiques pour guider les calculs du modèle solaire. Dans l'interaction avec ce détecteur, les neutrinos du 8B représentent 71% des neutrinos émis par le Soleil.

#992 - Màj : 12/04/2010

 

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