Les objectifs scientifiques   

À la recherche des sites de nucléosynthèse froide
L'univers offre un autre mode de nucléosynthèse qui ne requièrent pas les conditions de températures extrêmes qui sont celle des cœurs stellaires, c'est la brisure des noyaux ou spallation. C'est ainsi que les rayons cosmiques (protons et noyaux accélérés à des vitesses relativistes) qui sillonnent le disque galactique entrent parfois en collision avec des noyaux du milieu interstellaire (carbone, azote, oxygène), qu'ils fragmentent pour former des noyaux plus légers (lithium, béryllium, bore) dont il faut trouver l'origine ailleurs que dans les étoiles. Les conditions physiques qui règnent au sein des étoiles contribuent en effet à détruire ces fragiles noyaux pourtant produits dans les creusets stellaires.

Image VLT de la super bulle Henize 70.
L'activité des étoiles massives forme dans le milieu interstellaire des bulles démesurées comme ici dans le Grand Nuage de Magellan avec Henize 70, une nébuleuse dont le diamètre est de l'ordre de 100 a.l.

Des études récentes menées à Saclay et à l'Institut d'Astrophysique de Paris suggèrent aussi que certaines régions très riches en étoiles massives (comme les super bulles) produisent des flux intenses de noyaux accélérés. Par vent stellaire dans la phase Wolf-Rayet où lors des explosions de supernova, les étoiles massives rejettent en effet des flots de matière enrichie en hélium, carbone et oxygène. Les ondes de choc que produisent les supernovae alentour accélèrent ces particules en leur communiquant une énergie de quelques dizaines de MeV. Par collision avec les atomes du milieu environnant, ces noyaux rapides peuvent alors se fragmentent pour former des noyaux plus légers. Le mérite d'un tel modèle est de bien rendre compte des teneurs en lithium, béryllium et bore d'étoiles d'âges variés. Reste à valider ce scénario et c'est là que l'astronomie gamma intervient.

Les noyaux issus de processus de spallation se retrouvent en effet dans des états excités, d'où une éventuelle émission de rayons gamma par retour à l'état fondamental. Les interactions entre noyaux accélérés et au repos ne conduisent pas forcément à des processus de spallation, mais la collision même de deux noyaux peut les porter dans des états excités avec, là encore, une éventuelle émission de rayons gamma par retour à l'état fondamental. Sans oublier que les collisions mettant en jeu deux noyaux d'hélium contribuent également à la production de noyaux légers par fusion nucléaire. Comme ces derniers se retrouvent dans des états excités, on doit encore s'attendre à une éventuelle émission de rayons gamma par retour à l'état fondamental. En étudiant les superbulles de notre galaxie, sites potentiels des émissions gamma évoquées ci-dessus, INTEGRAL contribuera à mieux déchiffrer les processus de nucléosynthèse du lithium, du béryllium et du bore, ces éléments laissés pour compte tant par le big bang que par les étoiles.