12 mai 2004
VISIR : lumière sur la poussière céleste
Le nouvel instrument infrarouge du Very Large Télescope

L'instrument VISIR (acronyme pour "Vlt Imager and Spectrometer in the InfraRed" ou "Imageur et Spectromètre Infrarouge pour le VLT"), vient tout juste de délivrer ses premières images. Installée au foyer de l'un des quatres télescopes géants de l'Observatoire Européen Austral (ESO) au mont Paranal (Chili), cette caméra-spectromètre est le fruit d'une collaboration entre le CEA-DAPNIA de Saclay et le laboratoire ASTRON de Dwingeloo (Pays-bas). Elle offre avec une résolution de l'ordre de 0,3 secondes d'arc (soit seulement 500 m sur la Lune), une qualité d'image inégalée dans la gamme de longueur d'ondes de l'infrarouge moyen (10-20 microns) où émettent principalement les poussières cosmiques. Grâce à cet instrument, la communauté scientifique est désormais dotée d'un outil précieux pour l'étude de sites enfouis, la formation des planètes ou celles des étoiles, la chimie du milieu interstellaire ou bien encore l'évolution des galaxies.

 

Printemps 2004: VISIR est installé au foyer de Mélipal.


Visir à Saclay avant sont départ pour le Chili en route pour Paranal Paranal Visir monté au foyer de Mélipal

Le voyage de VISIR vers le Very Large Telescope (Mont Paranal/Chili) (cliquer sur chaque vignette pour agrandir).

30 avril 2004, la concentration règne dans la salle de contrôle du télescope "Melipal", l'un des quatre télescopes géants composant le VLT (Very Large Telescope). Techniciens, ingénieurs et astronomes liés au projet VISIR attendent avec impatience le résultat de plusieurs années d'effort. L'instrument d'un poids total de 1600 kg a été soigneusement mis en caisse et expédié du centre de Saclay, au sud de Paris, le 16 mars 2004. Il  arrive le 25 mars 2004 au sommet du mont Paranal, en plein coeur du désert d'Atacama dans le nord du Chili après un dernier tronçon périlleux, effectué par camion sur les pistes du désert.  VISIR, après avoir été soigneusement déballé, assemblé puis refroidi, est monté le 27 avril au foyer de "Melipal", le troisième télescope géant du VLT. VISIR, instrument sensible au rayonnement infrarouge moyen [1], est désormais prêt pour recevoir ses premiers photons. Il est constitué de deux caméras panoramiques possédant chacune 256x256 éléments sensibles à la lumière infrarouge. Comme le rayonnement infrarouge est émis par tous les objets environnants, pour être isolé de cette lumière infrarouge parasite, c'est tout l'ensemble de l'instrument qui a du être refroidi à une température proche de -250 degrés et les caméras elles-mêmes à une température encore plus extrême de -268 degrés, seulement cinq degrés au dessus du zéro absolu.

L'infrarouge moyen: un domaine idéal pour étudier la poussière "chaude" et le gaz interstellaire.

L'originalité de VISIR est d'être capable de capter la lumière couvrant une gamme de longueur d'onde de 8 à 25 microns (dit  "infrarouge moyen"). Ce domaine est particulièrement intéressant pour étudier la poussière "chaude", portée à des températures comprises entre -200 et 300 degrés Celsius. Cette poussière "chaude" est présente autour de nombreux astres de l'Univers, allant des objets très proches liés à notre système solaire (planêtes et comètes) jusqu'à des objets extrêmement lointains comme certains noyaux de galaxies, les quasars. Elle est aussi abondamment présente dans les régions où se forment les étoiles. Grâce à la qualité de ses caméras et à la taille du télescope géant du VLT, VISIR peut aujourd'hui obtenir depuis le sol une finesse d'images de ces régions, plus de dix fois meilleure que celle obtenue par les télescopes spatiaux comme le satellite Spitzer, en orbite depuis août 2003.

Le deuxième atout de VISIR est sa capacité d'analyse de la lumière infrarouge, grâce à son spectromètre. VISIR peut ainsi mesurer la lumière émise par le gaz interstellaire à des longueurs d'onde précises caractéristiques des différents éléments chimiques, les "raies d'émission". Un grand nombre de ces raies essentielles sont présentes en infrarouge moyen, notamment celles de la molécule d'hydrogène (H2) qui émet deux raies caractéristiques à 12 et 17 microns et dont le rapport des émissions respectives est particulièrement sensible à la température.

Premières images de VISIR.

 

 

 

L'instrument VISIR

L'instrument VISIR est le fruit d'un consortium sous contrat avec l'Observatoire Européen Austral (ESO) qui comprend le CEA/DSM/DAPNIA de Saclay et  l'Institut Hollandais pour la Recherche en Astronomie (ASTRON) de Dwingeloo (Pays-bas). Au CEA,  Le Service d'Astrophysique  (DAPNIA/SAp) assure la maîtrise d'oeuvre du projet et sa responsabilité scientifique tandis que le Service d'Ingénierie des Systèmes (DAPNIA/SIS) a pris une part essentielle dans le développement de mécanismes cryogéniques innovants. Le laboratoire ASTRON a réalisé le spectromètre.

Un mécanisme cryogénique original a du être spécialement conçu pour VISIR par le DAPNIA/SAp et développé et mis au point par le DAPNIA/SIS. C'est un moteur à entraînement direct, opérant sans réducteur et sans jeu et assurant un positionnement ultra-précis. Il est capable de fonctionner sans dissipation thermique à l'arrêt. Il a été optimisé pour marcher à très basse température (-253 degrés), mais fonctionne aussi bien à température ambiante.


 

VISIR en chiffres:
Poids total: 1600kg
Dimension: diamètre 1.2 m, hauteur 1m
Domaine spectral 8-13 µm (bande N) et 17-24 µm (bande Q)
Détecteurs (un pour chaque plan focal) Boeing 256x256 pixels
pixels (3 échelles possibles) 0.075, 0.127, 0.2 seconde d'arc
Champ de vue: 3 champs de vue possible dans le mode imagerie 19"x19", 32"x32", 51"x51"
Résolution spectrale: de 150 à 35000
Température de fonctionnement entre 5oK et  7oK pour les détecteurs, entre 15oK et 20oK pour le cryostat


Contact :  
                
(Responsable Instrument)

 

voir       Le communiqué de presse du CEA (12/05/2004)
            Le communiqué de presse de l'ESO (en anglais-12/05/2004)

voir aussi : "Le site VISIR du Service d'Astrophysique"
                "Le site VISIR de l'Observatoire Européen Austral (ESO) (en anglais)"
                "Le site VISIR de l'ASTRON (Institut Hollandais pour la Recherche en Astronomie) (en anglais)"


Notes
[1] Infrarouge moyen. Le domaine de l'infrarouge est généralement décomposé par les astronomes en trois sous-domaines qui reflètent grossièrement les différentes bandes d'absorption de l'atmosphère terrestre. L'infrarouge proche couvre la gamma 1- 5µm microns, l'infrarouge moyen  celle de 8-30µm tandis que l'infrarouge lointain, non observable depuis le sol, s'étend jusqu'à la longueurs d'onde de 1000µm soit 1mm. L'infrarouge moyen est également appelé infrarouge thermique.
1 µm = 1 micromètre = 1 micron = 10-6 m.
 

Rédaction  Christian Gouiffès et Yvon Rio
 
#1208 - Màj : 12/05/2004

 

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