21 septembre 2015
Premiers résultats de l’expérience Nucifer
Premiers résultats de l’expérience Nucifer

Cœur du réacteur Osiris.

La collaboration Nucifer, rassemblant des physiciens du CEA de l’Irfu (DSM), de la DEN, de la DAM, de Subatech Nantes (CNRS) et du Max Planck Institut d'Heidelberg, publie le 21/09/2015 les premiers résultats de l’expérience (http://arxiv.org/abs/1509.05610) et démontre la faisabilité et l’efficacité de la « neutrinométrie » des réacteurs nucléaires au stade de pré-industrialisation. Nucifer fonctionne automatiquement, auprès du réacteur Osiris sur le centre de Saclay, et détecte les antineutrinos électroniques créés dans les chaînes de désintégration des produits de fission nucléaire comme attendu. La sensibilité à la composition isotopique du combustible  dans le cœur d’Osiris a été chiffrée. Ces premiers résultats sont prometteurs et pourraient à terme avoir une application au profit de l'AIEA (l’Agence Internationale de l’Energie Atomique).

 

Nucifer est installé depuis le printemps 2012 sur le centre de Saclay à la distance la plus courte d’un cœur de réacteur jamais réalisée pour un détecteur de neutrinos. Positionné à seulement 7,2 m du cœur du réacteur de 70 MW Osiris, Nucifer mesure le flux d’antineutrinos électroniques émis avec une efficacité trois fois meilleure que les expériences similaires précédentes, et ce malgré un environnement très bruyant en radiations dû au faible enfouissement de l’expérience, équivalent à 12 m d’eau. Les premiers résultats basés sur 145 (106) jours de prise de données avec réacteur en fonctionnement (à l'arrêt) correspondent à la détection de 40760 candidats antineutrinos électroniques. Le nombre moyen d'antineutrinos détectés est de 281 (7) neutrino/jour, en accord avec la prédiction de 272 (23) neutrino/jour. La figure ci-contre montre les mesures de taux d’antineutrinos enregistrés par Nucifer, avec le réacteur en fonctionnement ou à l'arrêt. Les alternances ON/OFF sont clairement visibles.

 
Premiers résultats de l’expérience Nucifer

Taux journaliers de neutrino mesurés par Nucifer auprès du réacteur Osiris. Chaque point de mesure (losanges bleus) correspond à environ 5 jours de prise de données. La zone grisée illustre la valeur et l’incertitude du taux attendu. Les points rouges montrent les fluctuations du bruit de fond lorsque le réacteur est éteint.

La surveillance d’un réacteur par les neutrinos vise à suivre le fonctionnement du réacteur à distance et à évaluer l’évolution de la matière fissile dans son cœur. En effet, pour une même puissance fournie, le taux de neutrinos mesuré diminue en fonction de l’avancement de la réaction nucléaire et en particulier de la capture neutronique de l'238U ou de l’uranium consommé. 

A Osiris le combustible est renouvelé par 1/6 après chaque cycle d’une vingtaine de jours. Ce mode opératoire fait que la nature de la fission dans le coeur varie peu. C’est pourquoi aucune évolution significative du taux de comptage en fonction du temps n’est observée dans les données de Nucifer.

Nucifer a ainsi démontré que la détection à distance des antineutrinos électroniques émis dans les chaînes de désintégration des produits de fission dans les réacteurs nucléaires, combinée avec les simulations des cœurs de réacteur, était prometteuse et pourrait à terme avoir une application au profit de l’AIEA.

La suite envisagée par la collaboration est de trouver un emplacement pour le dispositif auprès d’un réacteur de puissance. L’idéal est que le détecteur soit sous terre (pour se blinder du bruit de fond des muons venant des cosmiques) et à une vingtaine de mètres du cœur afin de réduire drastiquement le bruit de fond issu du réacteur. La sensibilité de l’expérience sera augmentée d’un facteur 4 par rapport aux mesures auprès d’Osiris.  

Contacts : Thierry Lasserre (IRFU/SPP) & David Lhuillier (IRFU/SPhN)

 
#3613 - Màj : 08/11/2017

 

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