Les feux de forêt constituent un danger permanent, notamment dans les pays arides. Ils sont un frein au développement économique et une menace pour l'environnement, tant par la forte libération de gaz à effet de serre que par la destruction d'écosystèmes.
Le projet FORFIRE, incluant l'utilisation de détecteurs Micromegas1, a reçu le soutien de l'Union Européenne (Programme FP7) pour élaborer un réseau de capteurs sensibles à la lumière émise lors d'un incendie de forêt, permettant de le détecter presque instantanément (contre plusieurs minutes avec les méthodes actuelles).
Divers dispositifs existent déjà pour détecter les feux de forêts : tours d'observation humaine, surveillance satellite, survol d'avions, détecteurs infrarouge... Imprécises, coûteuses ou encore peu réactives, ces méthodes présentent en plus des inconvénients considérables, tels que le manque de disponibilité ou l'inadaptabilité au terrain.
Le système proposé par le projet FORFIRE s'appuie sur quatre piliers : la détection précoce des foyers ; leur localisation précise (grâce à l'association d'une caméra CCD 2 ; la transmission d'alertes en temps réel associées à des images permettant la confirmation humaine visuelle du départ de feu ; et un taux de fausses alarmes quasi nul. Le prix du dispositif devra être extrêmement compétitif (2.000€ environ).
Pour parvenir à la détection instantanée d'un départ de feu, la société à l'origine du projet (l'entreprise HERON Technologies, basée à Orléans) a fait appel à Ioannis Giomataris, l'un des inventeurs du principe de détection Micromegas. Celui-ci a réuni une équipe du Service d'Electronique, des Détecteurs et d'Informatique pour se lancer dans cette application. Les capteurs, basés sur la technologie Micromegas et équipés d'une photocathode spéciale permettant de détecter la lumière UV 3, devront permettre la détection de la partie UV du spectre émis par un incendie forestier, et ce dès son apparition.
Pour être en mesure de détecter rapidement le moindre départ de feu, aussi précoce et par conséquent petit soit-il, il faut être capable de capter un nombre de photons très faible. Les résultats obtenus en 1999 avec une photocathode de CsI déposée sur la micro-grille d'un détecteur Micromegas ont démontré que celui-ci était capable de détecter les photoélectrons uniques, issus de l'interaction de photons UV uniques avec la photocathode, avec une très bonne sensibilité : 90% d'efficacité en détection du photon unique. Les avantages d'un tel dispositif sont doubles : ce capteur est aveugle à la lumière du jour (lumière visible et lumière solaire) et demande une très faible consommation en énergie. Il est donc bien adapté à l'utilisation dans un réseau de surveillance quasi-autonome d'incendies.
Le projet a reçu une subvention européenne de 1.1 million d'euros, dans le cadre du programme FP7-Small and Medium Enterprises. Ce programme permet à un réseau identifié de Petites et Moyennes Entreprises innovantes de s'appuyer sur les instituts de recherche pour la recherche et le développement dans un segment de marché jugé prometteur. Outre le CEA de Saclay, qui y joue un rôle de premier plan, le projet FORFIRE réunit les instituts, entreprises et universités de plusieurs pays européens : HERON Technologies, l'université d'Athènes, l'Institut des Forêts de Pologne, Irish Precision Optics, OPTOEL (Roumanie), PINDIATEC (Espagne) et ITAV (Espagne).
Le porteur du projet, le Pr Panagiotis Pavlopoulos, est le président de HERON Technologies dont la recherche est ciblée sur l'évolution de prototypes « laboratoire » vers des prototypes industriels. Ses projets de recherche pourraient être regroupés dans deux grands domaines : la protection de l'homme et la protection de l'environnement. La coordination du projet est assurée par Tony Herbert, Finance and Operations Director de la société Irish Precision Optics.
Les recherches doivent durer deux ans, pour conduire à une description du dispositif, de ses performances et de ses modes de réalisation, en visant une commercialisation éventuelle de la caméra dans un délai d'un an environ après la fin du projet.
L'équipe du SEDI est en charge du développement du prototype, de son évaluation en laboratoire et de l'élaboration de fiches techniques pour la future industrialisation du système. Le dessin du premier prototype, comprenant l'optique d'entrée de lumière et le dispositif Micromegas à cathode photosensible, est présenté sur les figures 1 et 2.
Ce prototype sera évalué dans les prochains mois avec une source UV de référence. L'étude dans diverses conditions météorologiques d'une flamme normalisée, caractérisée préalablement par HERON Technologies, permettra en effet de disposer des courbes de réponse spectrale correspondant aux différentes situations rencontrées.
Par sa sensibilité dans la gamme UV, un tel dispositif peut détecter la lumière émise par effet Cerenkov. Il peut aussi observer la lumière de scintillation, en particulier pour les liquides et gaz nobles. La structure, les méthodes de fabrication et les coûts des détecteurs Micromegas permettent d'envisager des surfaces de détection difficilement accessibles aux photodétecteurs habituels, tout en assurant de bonnes caractéristiques métrologiques et temporelles. Au-delà de la problématique de la détection de feu présentée ici, ce concept paraît très attractif pour l'instrumentation en physique et pour l'instrumentation biomédicale, et pourrait aussi trouver des débouchés en métrologie industrielle.
1) MICROMEGAS: MICRO-MEsh GAseous Structure.
2) CCD : Charge Coupled Device.
3) UV : Ultra-Violet.
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