Les nombres, le long de l'axe horizontal, montrent le passé de l'univers en milliards d'année. Ceux le long de l'axe vertical décrivent le taux d'expansion de l'univers, plus il sont grands plus l'univers se dilate rapidement. Les mesures plus anciennes sont représentées à droite sur le graphe.
Les nouvelles mesures de SDSS-III, correspondant au point rouge, sondent la structure de l'univers à une époque où son expansion était encore en train de ralentir doucement.
Des astrophysiciens du projet SDSS-III (Sloan Digital Sky Survey), composé en grande partie de chercheurs français, du CEA Irfu et du CNRS In2p3 et INSU, ont effectué la première mesure du taux de l’expansion de l’Univers jeune, âgé de seulement trois milliards d’années sur ces 13,7 milliards, alors que la gravité freinait encore son expansion, avant sa phase actuelle d'expansion accélérée par l'Energie Noire. Ils ont utilisé pour cela une nouvelle technique permettant de dresser une carte en trois dimensions de l’Univers lointain. Ce résultat est en ligne sur arXiv.org.
Hubble et Lemaître ont mis en évidence l’expansion de l’Univers dans les années 1920 en procédant à deux types de mesures pour un même ensemble de galaxies : la distance entre ces galaxies et nous, ainsi que la vitesse de ces galaxies (en utilisant l’effet Doppler sur les raies de leurs spectres).
Leurs observations sont à l'origine du modèle "standard" actuel de la cosmologie. Pendant la plupart de l’histoire de l’Univers, cette expansion n’a cessé de ralentir, sous l'effet de la gravitation de matière et de la radiation. Mais depuis cinq milliards d'années, quand l’Univers avait environ 7 milliards d’années, ce comportement s'est inversé : l'expansion s'est mise à accélérer, probablement sous l'effet d'une mystérieuse force répulsive produite par ce qu’on a appelé : "l'énergie sombre". Des expériences en cosmologie ont permis d’observer cette période d'accélération récente, mais pas la décélération primitive de l’Univers. Réussir à mesurer cette décélération exige de remonter aux premiers milliards d’années de son histoire, de remonter loin dans le temps, donc d’observer loin dans l’espace. Pour cela, des galaxies ne suffisent plus : à des distances aussi élevées, leur luminosité devient trop faible.
Pour contourner le problème, les astronomes du Sloan Digital Sky Survey composé notamment de chercheurs français, se sont donc intéressés aux quasars, des astres lointains et extrêmement brillants. Lorsqu’on mesure le spectre d’un quasar, on voit non seulement sa lumière mais aussi l’absorption résiduelle du gaz intergalactique entre le quasar et nous. Les astronomes ont pu ainsi étudier la distribution du gaz intergalactique et y détecter des nuages d’hydrogène. A partir de toutes les lignes de visée des quasars et de la corrélation des densités d'hydrogène , les astronomes ont pu extraire la vitesse relative de ces nuages de gaz , et reproduire une expérience similaire à celle d'Hubble et Lemaître sur le taux d'expansion des galaxies mais avec le gaz intergalactique au lieu des galaxies.
Pour appliquer efficacement cette technique de mesure innovante de SDSS-III, dite de la « forêt Lyman-alpha », encore fallait-il pouvoir disposer d’un très grand nombre de quasars, et dresser ainsi une carte de l’univers lointain et en trois dimensions. C’est le groupe français de SDSS, en partie financé par l’ANR, qui s'est principalement spécialisé dans la recherche, l'étude et la sélection des quasars à observer. Le premier catalogue de la collaboration a été publié mi-octobre et contient 89 000 quasars. L’étude a porté ensuite sur 50 000 de ces quasars.
La lumière de quasars distants (les points à gauche) est partiellement absorbée lorsqu’elle traverse des nuages d’hydrogène intergalactique (au centre). Ce phénomène crée une « forêt » de raies d’absorption, qui peut être interprétée pour créer une carte du gaz.
Les points jaunes sont les quasars précédemment connus. Les points rouges sont les quasars découverts par BOSS. BOSS a collecté des spectres de dix fois plus de quasars que les précédents relevés.
Crédit : Zosia Rostomian et Nic Ross (Lawrence Berkeley National Laboratory) et la collaboration SDSS-III
En 2008, trois laboratoires français (APC, IAP et Irfu) ont rejoint, le relevé BOSS au sein de la collaboration SDSS-III. Ces trois laboratoire ont formé le FPG (French Participation Group) qui est très actif au sein de BOSS, notamment, en ce qui concerne l'étude des oscillations baryoniques acoustiques (BAO) avec des quasars. Le FPG participe à toute les étapes de cette analyse.
A la fin du relevé, en 2014, il aura mesuré plus d’un million et demi de galaxies, et plus de 160 000 quasars. Il aura aussi permis de démontrer que la technique de mesure de la « forêt Lyman-alpha » n’est plus un pari risqué, mais une méthode standard pour explorer l’Univers lointain.
Contact Irfu: James Rich
• Structure et évolution de l'Univers › Univers sombre
• Le Département de Physique des Particules (DPhP)
• BAO