L’Irfu conduit des recherches fondamentales, principalement expérimentales mais aussi théoriques, sur les nucléons et les noyaux, briques élémentaires de la matière dont la cohésion est assurée par l’interaction forte.
L'interaction forte se manifeste à deux échelles successives. La première est celle des assemblages de quarks et de gluons, qu’ils soient déconfinés dans un plasma ou liés dans le nucléon et dans d'autres hadrons. La seconde concerne les assemblages de nucléons qui constituent les noyaux des différents atomes. L’objectif de l’Irfu est l’approfondissement de nos connaissances sur ces systèmes, ainsi que la découverte d'états extrêmes de la matière nucléaire :
L’étude des réactions nucléaires s’attache à décrire les mécanismes et les processus d’évolution de la matière nucléaire lorsque celle-ci est soumise à une modification de son état. Cette modification peut survenir après une excitation externe (par exemple la capture d’un neutron) ou interne (par exemple la transmutation d’un de ses constituants par interaction faible). Cette évolution est la conséquence de la dynamique de chaque nucléon en interaction avec ses voisins et du réarrangement de l’édifice nucléaire.
La complexité de la description de ces réactions résulte dans le traitement de la dynamique d’un système quantique à N-corps en interaction. A haute énergie transférée, les effets de structure disparaissent et le traitement quantique peut-être approximé par un traitement classique. A plus basse énergie, il n’est plus possible de négliger le caractère quantique des nucléons et le traitement devient alors plus complexe. Aujourd’hui, les approches dites ab-initio sont encore loin d’avoir une précision satisfaisante pour décrire certains phénomènes pour lesquels le rôle de la structure est très important comme dans le cas de l’interaction neutron-noyau à très basse énergie où des résonnances apparaissent dans les sections efficaces ou dans le cas de la fission. Les mesures sont donc indispensables et les approches de modélisation sont plus phénoménologiques ou effectives faisant appel à la théorie de la diffusion et aux notions de la thermodynamique des systèmes complexes.
L'aspect structurel du noyau atomique est régi par l'interaction entre les nucléons, protons et neutrons, liés par l'interaction forte. Ce système quantique à plusieurs corps est souvent décrit par un champ moyen nucléaire bâti sur une interaction effective nucléon-nucléon. Cette interaction est devenue de plus en plus élaborée à mesure que les données précises de spectroscopie s'accumulaient. Jusqu'aux années 1980, ces données provenaient principalement des noyaux stables pour lesquels l'isospin, relié à la différence entre le nombre de protons et de neutrons, subit de faibles variations. La dépendance en isospin de l'interaction nucléaire effective n'est pas bien connue, ce qui réclame des études approfondies.
L’interaction entre quarks et gluons est décrite par la théorie de la Chromodynamique Quantique (QCD). Cette interaction, dite forte, les confine à l'intérieur des protons, neutrons et autres hadrons. Lorsqu’un hadron est cassé, les quarks et les gluons le constituant, au lieu de se libérer, se recombinent avec d'autres quarks et gluons fraichement crées pour en former de nouveaux hadrons aux propriétés différentes. Cependant, pour des températures très élevées, la QCD prédit la diminution progressive de la force forte au point que le confinement ne s’appliquerait plus. La matière serait alors dans un nouvel état de quarks et de gluons libres, appelé plasma de quarks et de gluons (QGP).
Environ un millionième de seconde après le Big Bang la température de l’Univers était environ 100 000 fois supérieure à celle régnant au centre du Soleil. Les conditions nécessaires à la présence du QGP y étaient réunies. Depuis l’Univers s’est refroidit et le plasma a donné lieu aux hadrons que l’on observe aujourd’hui. Depuis trente ans, des expériences cherchant à reproduire ces conditions en laboratoire se succèdent du SPS au LHC au CERN près de Genève en passant par le RHIC au BNL près de New York. Des noyaux d’atomes lourds, e.g. de Plomb, y sont accélérés à une vitesse proche de celle de la lumière suffisante pour créer, lors de la collision entre noyaux, un QGP si petit (environ la taille d’un noyau, 10-15 mètres) et qui se refroidit si vite (environ 10-23 secondes après la collision) qu’il est impossible de l’observer directement.
D'énormes détecteurs de particules sont utilisées afin de reconstruire les milliers des particules résultant de l'hadronisation du QGP ainsi que de celles, appelées sondes dures, qui sont créées aux tous premiers instants de la collision, avant même que le QGP soit formé, et qui l'auront donc traversé. L'étude des débris de la collision permettent de remonter à la formation du QGP pour en étudier ses propriétés.
Le DPhN est fortement engagé dans l’étude de la structure en partons (quarks et gluons) des particules, et en premier lieu, des protons et neutrons. Ces nucléons sont un cas singulier en physique car environ 90 % de leur masse est due non à la masse de leurs constituants, mais à l’interaction forte à laquelle ils sont soumis. Les nucléons sont aussi un laboratoire pour étudier le mécanisme de confinement et déconfinement qui, bien que QCD soit une théorie bien établie au sein du modèle standard, reste une question-clé ouverte. L'étude de la structure en quarks et gluons du nucléon est ainsi complémentaire de la caractérisation du plasma de quarks et de gluons et de sa transition de phase associée.