A l’heure actuelle, le seul supraconducteur apte à succéder à moyen terme au niobium titane (NbTi) dans des applications à grande échelle nécessitant des électroaimants de fortes densités de courant dans des champs magnétiques élevés - supérieurs à 12 teslas - est le composé intermétallique de niobium étain (Nb3Sn). Le programme de recherche et développement, mené en collaboration par le CEA et Alstom, a pour objectif de maîtriser et de faire progresser la technologie du Nb3Sn pour la maîtrise d’œuvre de nouveaux projets d’aimants supraconducteurs à très forts champs. Trois actions clés sont menées en parallèle : le développement de fils en Nb3Sn à très hautes performances, la fabrication d’un quadripôle et le développement d’une isolation électrique en céramique.
Le développement est articulé en deux phases. La première phase concernait le développement d’un fil de Nb3Sn répondant aux spécifications des bobines modèles d’Iter et avait pour but de permettre à Alstom de combler son retard par rapport à ses concurrents, en particulier américains, tant en terme de performances que de rendement et de coûts de production. Le but a été atteint en 1999 avec un fil de 750 A/mm2 à 4,2 K et 12 T. Pour rester compétitif au niveau mondial, Alstom développe actuellement, dans une seconde phase, un fil de 2000 A/mm2 aux mêmes température et champ magnétique. Cette seconde phase constitue une étape intermédiaire vers l’objectif encore plus ambitieux d’une densité de courant critique de 1500 A/mm2 à 4,2 K et 15 T (correspondant à 3000 A/mm2 à 4,2 K et 12 T) fixé par l’activité de recherche européenne Care/NED.
Le composé Nb3Sn a une température critique et un champ critique qui sont à peu près le double de ceux du NbTi. Cependant, il présente les inconvénients d’être très fragile et d’avoir des paramètres critiques - comme la densité de courant - sensibles aux déformations. Comparé au NbTi, il faut donc complètement repenser la conception et la fabrication des bobines afin de limiter les risques de dégradation.
Depuis 1995, le SACM a entrepris un programme de conception, construction et test à froid d’un quadripôle basé sur la conception des aimants quadripolaires du Large hadron collider développé par le SACM pour le Cern. L’ouverture est de 56 mm et le gradient de champ nominal de 223 T/m pour un courant de 11870 A. Ce programme comporte la réalisation d’un modèle prototype intégrant le conducteur développé par Alstom dans la phase 1.
Les trois dernières années ont été consacrées à la finalisation de la conception et à l’approvisionnement des principaux composants et de l’outillage nécessaires pour le quadripôle modèle. Toutes les longueurs de câble seront livrées au début de l’année 2004. Le démarrage du bobinage du premier pôle est prévu en août 2004 et un test à froid de l’aimant à la fin de l’année 2005.
Le développement d’une « isolation céramique » a pour objectif l’étude et la mise en œuvre d’une isolation électrique pouvant supporter le traitement thermique à haute température (600 à 700°C) nécessaire à la formation du niobium-étain. Les conducteurs sont guipés avec un ruban de fibre de verre enduit de précurseurs qui réagissent pendant le cycle thermique à haute température, formant ainsi l’isolation et assurant la tenue mécanique de la bobine. Dans le même temps, le composé niobium-étain est constitué. On supprime ainsi deux étapes délicates de la fabrication : la manipulation de la bobine après réaction pour la sortir de son moule à un stade où elle est très fragile et l’étape d’imprégnation sous vide avec une résine de type époxy. Ce développement lèverait un des verrous de la technologie des bobinages compacts en Nb3Sn en simplifiant leur gamme de fabrication et en la rendant plus industrielle.
Evolution de la viscosité de la solution de précurseur, en fonction du taux de vitesse de déformation, montrant son comportement rhéologique. La solution doit assurer une bonne imprégnation du ruban et avoir une bonne plasticité.
Depuis janvier 2001, les développements se poursuivent dans le cadre d’une thèse cofinancée CEA-Région Languedoc Roussillon en collaboration avec le Laboratoire des céramiques et des composants avancés (CEA, Le Ripault) et l’Institut européen des membranes (CNRS, Montpellier). Cela s’est traduit par la mise au point d’une solution de précurseur adaptée, après la détermination des composants et une étude rhéologique, et, en parallèle, le développement d’un banc d’imprégnation pour les rubans de fibre de verre. Les premières étapes de mise en œuvre de l’isolation, à savoir l’enduction du ruban et le guipage d’un câble conducteur, ont été validées. Les premiers tests électriques ont montré que la présence de l’isolant lors de la réaction thermique ne modifiait pas les propriétés du cuivre entourant le brin conducteur. Des caractérisations électriques et mécaniques sont en cours.
Deux brevets sur le « procédé de fabrication d’une gaine électriquement isolante et mécaniquement structurante sur un conducteur électrique » ont été déposés par le CEA, en juillet 2001 et en mai 2003.
• Physique et technologie des aimants supraconducteurs › Instrumentations et développements pour les aimants de recherche
• Le Département des accélérateurs, de cryogénie et de magnétisme (DACM)