Livraison de VIS à l’ESA : une des plus grandes «caméras» spatiales pour percer les mystères de l’Univers sombre

Livraison de VIS à l’ESA : une des plus grandes «caméras» spatiales pour percer les mystères de l’Univers sombre

En 2022, l’ESA lancera le télescope Euclid, qui vise notamment à cartographier les galaxies lointaines en 3D, caractériser la matière noire et mieux comprendre l’origine de l’expansion accélérée de l’univers. Ses deux instruments viennent d’être livrés à l’ESA par le consortium international Euclid. L’imageur visible VIS, sous la responsabilité du laboratoire des sciences spatiales Mullard de l'UCL (UCL MSSL – Royaume-Uni), a impliqué une participation majeure importante du CEA-Irfu. Il s’agit de la deuxième plus grande caméra spatiale en lumière visible jamais réalisée.

Le télescope Euclid observera les galaxies lointaines, afin notamment d’étudier la matière noire et déterminer l’origine de l’accélération de l’expansion de l’Univers et la nature de sa source, l’énergie noire. Personne ne sait encore ce qu'est l'énergie noire, mais Euclid sera un outil déterminant et décisif pour aider les cosmologistes et les astronomes à en percer certains secrets.

L’instrument VIS © L.Godart/CEA

Le Dr Yannick Mellier (Institut d'Astrophysique de Paris et CEA-Irfu), à la tête du Consortium Euclid formé de plus de 1500 personnes, dont le développement de l’instrument VIS fait partie, a déclaré : « Euclid va révolutionner notre connaissance de l'Univers en effectuant les mesures les plus précises de la matière noire et de l'énergie sombre, en testant si la théorie de la relativité générale d'Einstein doit être modifiée, en pesant les neutrinos et en explorant les détails de l'évolution des galaxies ». A propos du VIS, Y. Mellier ajoute « Le VIS a été construit pour acquérir des images de très haute résolution afin de mesurer les formes des galaxies avec une précision inégalée ».

50 000 galaxies caractérisées en une seule image prise toutes les 10 minutes

Le télescope Euclid dispose d'un télescope de 1,2 mètre de diamètre optimisé pour fonctionner dans les longueurs d'onde du visible et de l'infrarouge proche. Il recueillera la lumière des objets lointains de l’Univers et injectera la lumière visible dans l’instrument VIS, offrant la plus grande et la plus précise étude 3D de l'Univers jamais réalisée. La lumière infrarouge sera, quant à elle, envoyée vers le deuxième instrument, le spectrophotomètre fonctionnant dans l'infrarouge proche, appelé NISP, qui vient également d’être livré par le Consortium Euclid, et permettra la réalisation de mesures de distance de ces galaxies et donc de la structuration tridimensionnelle de l’Univers et son évolution au cours de l’histoire cosmique.

© Euclid Consortium

Le professeur Mark Cropper (UCL MSSL), responsable scientifique de l'instrument VIS, a déclaré : « La caméra VIS prendra pendant au moins six ans des images de tout le ciel utile pour la cosmologie à grande échelle et atteindra les parties les plus éloignées de l'Univers. Chacune de ces images sera plus de 70 fois plus grandes que celles captées par le télescope spatial Hubble et contiendra des informations utiles à tous les domaines de la recherche en astronomie. Elles seront disponibles pour les astronomes et le public, permettant à chacun de profiter de la beauté du Cosmos ».

Interview de Michel Berthé, responsable du programme Euclid au CEA-Irfu

Extrait de la vidéo « L'imageur VISible d'Euclid » © Consortium Euclid/Maarten Roos

L'instrument VIS est équipé d'un plan focal composé de 36 capteurs CCD totalisant plus de 600 millions de pixels et développé par le CEA-Irfu. Michel Berthé, responsable du programme Euclid au CEA-Irfu a déclaré : « Chaque image acquise en vol par ce plan focal permettra de caractériser plus de 50 000 galaxies. C'est la deuxième plus grande caméra spatiale observant dans les longueurs d’ondes visibles après celle du satellite Gaïa. Ces observations permettront de mesurer les déformations des galaxies dues aux faibles effets de lentille gravitationnelle induits par les concentrations de matière noire que la lumière rencontre sur son chemin pour nous arriver. Ces effets de distorsion gravitationnelle, mesurés à différents âges de l'Univers, fourniront des mesures de la distribution de la matière noire et constitueront une contrainte sur l'énergie sombre ».

Les premières études de ce plan focal ont été menées à l’Irfu depuis 2010 et après presque 10 ans de développements et de tests, c’est durant l'année 2019 qu’il a été testé intégralement par l’Irfu.

Les contraintes de l'intégration en salle blanche du plan focal de VIS

Extrait de la vidéo « L'imageur VISible d'Euclid » © Consortium Euclid/Maarten Roos

Plusieurs dizaines de Pétaoctets de données à traiter

Les données accumulées par Euclid représenteront des centaines de milliers d'images et plusieurs dizaines de pétaoctets (1015 octets) de données. Cette énorme quantité d’informations sera traitée par le « segment sol » dans lequel le CEA-Irfu et le CNRS jouent également un rôle clé, tant dans sa gestion scientifique que dans la définition des algorithmes complexes nécessaires à la réduction des données.

Carte des centres de calcul impliqués sur le projet Euclid © Consortium Euclid

Livraison de VIS : les partenaires

L'instrument VIS a été livré par une équipe d'astronomes et d'ingénieurs de l'UCL Mullard Space Science Centre et de l'Open University au Royaume-Uni, avec des équipes de l’Institut de recherche sur les lois fondamentales de l’Univers du CEA (CEA-Irfu) et de l'Institut d'Astrophysique Spatiale (CNRS IAS) en France, de l'Istituto di Astrofisica e Planetologia Spaziali (IAPS) en Italie et de l'Université de Genève en Suisse. Le programme VIS a été financé en France par le CNES, le CEA et le CNRS et par les agences spatiales respectives au Royaume-Unis, en Italie et en Suisse.

Les instruments VIS et NISP ont été livrés à l’ESA pour être intégrés au télescope développé par Airbus Defence and Space, à Toulouse. Celui-ci sera ensuite couplé au reste du satellite Euclid.

Contact Irfu: Michel Berthé

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