Certaines des sept planètes de l’étoile Trappist-1 possiblement habitables

Certaines des sept planètes de l’étoile Trappist-1 possiblement habitables

Deux articles publiés le 5 février dans la revue Nature Astronomy et Astronomy & Astrophysics, reviennent sur les exoplanètes gravitant autour de l’étoile Trappist-1, découvertes en février 2017.

TRAPPIST-1 est une toute petite étoile rouge située à 40 années-lumière de nous et qui possède au moins 7 planètes dont la taille est comprise entre 0,75 et 1,15 rayons terrestres. Ces planètes transitent devant le disque de leur étoile à chacune de leurs révolutions, avec des périodes orbitales qui vont de 1,5 à 19 jours seulement ! Malgré son extrême compacité, ce système possède plusieurs planètes tempérées, ni trop chaudes ni trop froides, potentiellement capable d'avoir des océans de surface. Trappist-1 nous offre des opportunités pour l'instant uniques de caractériser des planètes de taille et température terrestres hors du système solaire.

Les deux articles présentent des résultats observationnels issus de différents instruments exploitant des méthodes différentes pour caractériser l'atmosphère des exoplanètes et la dynamique de ce système planétaire.

Ces études ont été réalisées par une équipe internationale impliquant des chercheurs français du Laboratoire d’astrophysique de Bordeaux (CNRS/Université de Bordeaux), du département d’astrophysique du CEA (Irfu/DAp) et du Laboratoire de météorologie dynamique (CNRS/École polytechnique/Sorbonne université/ENS Paris). Elles sont publiées le 5 février 2018 dans Nature Astronomy et Astronomy & Astrophysics.

Vue d’artiste des différentes exoplanètes qui gravitent autour de l’étoile Trappist-1 Credits: NASA/JPL-Caltech

Etude de la composition des atmosphères

article Nature astronomy « Atmospheric reconnaissance of the habitable-zone Earth-sized planets orbiting TRAPPIST-1 » Wit et al

Lorsque les planètes passent devant leur étoile, on peut tenter de détecter par spectroscopie l'absorption de la lumière stellaire par les limbes d'éventuelles atmosphères. Une première mesure de ce type vient d'être tentée avec le télescope spatial Hubble (De Witt et al., Nature Astronomy). Si Hubble n'a pas la précision nécessaire pour révéler des atmosphères de composition similaires à celle de la Terre, de Vénus ou de Mars, il peut détecter des atmosphères riches en hydrogène comme celles des planètes géantes. Légères, ces atmosphères s'étendent loin de la surface et donnent une signature plus détectable. Les données de Hubble ont permis de démontrer l'absence de telles atmosphères pour les planètes internes du système. Cette découverte est en accord avec les estimations de l’érosion atmosphérique de ces planètes (travail de E. Bolmont du CEA) et démontre une fois de plus l’intérêt d’étudier TRAPPIST-1. En effet, si les planètes ont perdu leur atmosphère d’hydrogène originelle, cela signifie qu’elle peuvent avoir une atmosphère secondaire de composition plus proche à celle de la Terre (faite de composés plus lourd) et donc plus propice à la présence d’eau liquide en surface.

Ces données Hubble permettent aussi de préparer les observations avec le futur télescope spatial James Webb qui, lui, aura la précision pour détecter des atmosphères beaucoup plus fines, faites de composés plus lourd comme la vapeur d'eau, l'azote, l'oxygène, le méthane ou le dioxyde de carbone.

Transits de TRAPPIST-1 g et e obtenus avec Hubble. Les transits mesurés à plusieurs longueurs d’ondes permettent de connaître la composition des atmosphères.

Etude de la dynamique du système planétaire

article Astronomy & Astrophysics « he nature of the TRAPPIST-1 exoplanets » . Grimm et al.

Une partie de la caractérisation de ces planètes implique de connaitre leur masse et leur densité. Si leur rayon peut être précisément déterminé lors des transits, la mesure de leur masse n'est pas accessible aussi directement. Pour contraindre les masses, Grimm et al. (Astronomy & Astrophysics) ont chronométré précisément des centaines de transits observés depuis le sol avec divers télescopes dont TRAPPIST, SPECULOOS et le VLT de l'ESO, mais également avec les télescopes spatiaux de la NASA, Spitzer et Kepler. La proximité des planètes entre elles est telle que l'attraction gravitationnelle perturbe la régularité des orbites et produit des retards et des avances des moments de transit. Or ce manque de ponctualité dépend de la masse des planètes. En comparant des simulations orbitales où l'on fait varier les masses des planètes avec les mesures, on parvient à contraindre les masses, et les densités avec une précision de l'ordre de 5-10%. Ces densités sont globalement inférieures à celle de la Terre. Réalisée par E. Bolmont du CEA, l’étude de la dynamique orbitale du système avec ces nouvelles estimations de masse ne change pas les conclusions des études précédentes. La planète la plus interne devrait subir un chauffage de marée intense (plus que pour Io, le satellite de Jupiter).

Densités des planètes de TRAPPIST-1 en fonction du flux qu’elles reçoivent de leur étoile (plus le flux est faible plus les planètes sont distantes). Les planètes c et e ont des densités proches de celle de la Terre, mais les autres ont des densités plus faibles ce qui signifieraient qu’elles sont plus riches en volatiles.

Conclusions

Grâce aux mesures de Hubble mentionnées précédemment (Wit et al. ), cette nouvelle étude peut exclure des enveloppes d'hydrogène pour expliquer les masses des planètes. Ceci implique que plusieurs planètes de TRAPPIST-1 ont une teneur en eau et composés volatiles supérieure à celle de notre planète, allant jusqu'à 5% en masse (alors que l'eau ne constitue que 0.1% de la masse de la Terre). Une particularité étonnante est que la planète la plus proche de l'étoile, TRAPPIST-1b semble avoir la plus forte teneur en eau. Alors que l'on s'interroge sur la perte d'eau massive que peuvent provoquer sur leurs planètes les petites étoiles rouges (en raison de leurs émissions X, UV et de particules), la confirmation que TRAPPIST-1 b est riche en eau constituerait un cas précieux montrant que de grandes quantités d'eau peuvent exister malgré tout dans ce type d'environnement. Il faut toutefois rester prudent quant aux conclusions qui, pour être définitives, nécessiteront de chronométrer des transits sur une plus longue période afin d'améliorer encore la mesure des masses. Mais le processus est en cours, ouvrant une avenue pour la planétologie comparée et l'étude de l'habitabilité autour d'autres étoiles que le Soleil.


Contact Irfu : Emeline Bolmont Pubications :

Atmospheric reconnaissance of the habitable zone Earth-sized planets orbiting TRAPPIST-1.

Julien de Wit, Hannah R. Wakeford, Nikole K. Lewis, Laetitia Delrez, Michaël Gillon, Frank Selsis, Jérémy Leconte, Brice-Olivier Demory, Emeline Bolmont, Vincent Bourrier, Adam J. Burgasser, Simon Grimm, Emmanuël Jehin, Susan M. Lederer, James E. Owen, Vlada Stamenković and Amaury H. M. J. Triaud. Nature Astronomy, le 5 février 2018. DOI : https://doi.org/10.1038/s41550-017-0374-z

The nature of the TRAPPIST-1 exoplanets. Simon L. Grimm, Brice-Olivier Demory, Michaël Gillon, Caroline Dorn, Eric Agol, Artem Burdanov, Laetitia Delrez, Marko Sestovic, Amaury H.M.J. Triaud, Martin Turbet, Émeline Bolmont, Anthony Caldas, Julien de Wit, Emmanuël Jehin, Jérémy Leconte, Sean N. Raymond, Valérie Van Grootel, Adam J. Burgasser, Sean Carey, Daniel Fabrycky, Kevin Heng, David M. Hernandez, James G. Ingalls, Susan Lederer, Franck Selsis, Didier Queloz. Astronomy & Astrophysics, le 5 février 2018.

En Savoir +:

La naine rouge et les Sept Terres (20 février 2017)

vidéo de la conférence d'actualité du 6 mars 2017 du CEA Paris-Saclay

Intervenant(e)s : Emeline Bolmon, Stéphane Mathis, Antoine Strugarek,Pierre-Olivier Lagage
Durée de la conférence : 1h20min, Copyright CEA / DRF

https://youtube.com/watch?v=ahjlee6n8ki