Le projet WHOLESUN : comprendre les mécanismes physiques à l’origine de l’activité éruptive du Soleil et de ses jumeaux stellaires

Le projet WHOLESUN : comprendre les mécanismes physiques à l’origine de l’activité éruptive du Soleil et de ses jumeaux stellaires

Ce projet WHOLESUN vient d’être financé pour une durée de six années par une prestigieuse bourse Synergy du Conseil européen de la recherche (ERC). Cinq experts Européens du Soleil et des étoiles, issus du département d’Astrophysique du CEA-Irfu / UMR AIM, du Max Planck Institute for Solar System Research (MPS) en Allemagne, de l'Université de St Andrews au Royaume-Uni, de l'Université d'Oslo en Norvège et de l'Institut d'Astrophysique des Canaries (IAC), vont mettre en commun leurs savoir-faire et connaissances de la dynamique de notre étoile et de ses jumeaux. L’objectif est de déterminer au cours des six prochaines années comment le champ magnétique est généré à l'intérieur du Soleil et comment il crée des tâches solaires à sa surface et des éruptions dans son atmosphère hautement stratifiée. À cette fin, l'équipe développera le modèle du Soleil complet le plus avancé à l'aide des super ordinateurs les plus puissants, dits Exa-scale et le contraindra avec les observations venant de missions spatiales, tel que Solar Orbiter de l’Agence Spatiale Européenne (ESA) qui sera lancé en 2020.

Image du Soleil dans 3 couleurs obtenue en mélangeant les bandes spectrales UV (171, 195 et 284 Angstrom) ) de l’instrument EIT à bord de SoHO

Nous vivons autour d'une étoile magnétique active, notre Soleil, qui a un impact direct sur notre société technologique par sa variabilité et son comportement éruptif. Malgré des décennies de recherches intenses, des questions fondamentales restent pour la plupart sans réponse, telles que : Comment fonctionne le Soleil ? Pourquoi possède-t-il un cycle magnétique, des taches sombres et une atmosphère chaude dynamique ?
« Dans le projet Whole Sun, nous voulons pour la première fois aborder ces questions clés comme un tout cohérent. Pendant trop d'années, le Soleil a été divisé en sujets de physique solaire interne et externe et une vue globale intégrée de sa dynamique complexe des plasmas a fait défaut. Par exemple, les simulations de dynamo cherchant à répondre à l'origine du champ magnétique et à son comportement cyclique négligent la physique de surface et l'existence de taches solaires, de même que les modèles de surface prennent souvent le champ magnétique comme une entrée donnée sans connaître en détail l'interaction non linéaire entre convection, rotation et champs magnétiques dans l'enveloppe externe du Soleil », dit Dr. Allan Sacha Brun, chef du laboratoire dynamique des étoiles, des exoplanètes et de leur environnement (LDE3) du Département d’Astrophysique (DAp-AIM) au CEA- Paris-Saclay, et coordinateur du projet.

L’activité solaire, avec ses nombreuses manifestations et éruptions de nuages magnétisés et de particules qui peuvent impacter la Terre, doit être anticipée pour mieux s'en prémunir et en limiter les effets négatifs. La comprendre est donc un enjeu sociétal fort. « Le projet WHOLESUN est une approche multidisciplinaire innovante en physique solaire qui amènera à de fructueuses collaborations en Europe », prévoit le Professeur Eric Priest de l’Université de St Andrews.
En effet, au cours des dernières décennies, la recherche en physique solaire s'est concentrée sur l'étude de la structure et de la dynamique de l'intérieur du Soleil ou de la surface/atmosphère solaire. L’objectif est de consolider les études de ces deux grandes régions solaires, grâce à de fortes synergies entre les membres de l'équipe, afin d'acquérir une compréhension avancée de leur couplage et du Soleil. « L'étude détaillée du couplage (thermo)dynamique et magnétique entre le cœur du Soleil, la surface solaire et l'atmosphère hautement stratifiée est absolument essentielle si l'on veut aborder les problèmes clés et ouverts de la physique solaire » argumente Dr. Antoine Strugarek (DAp-AIM) impliqué dans le projet.

Prof. Laurent Gizon (haut gauche), Dr. Vasilis Archontis (haut droite), Prof. Mats Carlsson (bas gauche) et Dr. Allan Sacha Brun (bas droite) lors de la préparation de l’oral ERC Synergy fin août 2018.

En regroupant des experts de chaque coté de la surface solaire (photosphère) reconnus mondialement, l’équipe développera les simulations du Soleil et les méthodes d’analyses les plus avancées afin de suivre le « cycle de vie » du champ magnétique solaire, depuis sa formation et son amplification à l’intérieur du Soleil par effet dynamo, jusqu’à son émergence à la surface et sa dynamique éruptive dans l’atmosphère. Le DAp-AIM, outre son expertise sur la dynamique turbulente des étoiles de type solaire et l’origine de leur magnétisme, participera activement au développement du nouveau code solaire global grâce à l’expertise de la Maison de la Simulation (MdS) : « avec l’avènement des ordinateurs exa-scale calculant plusieurs milliards de milliards de calculs par seconde, il est devenu essentiel, pour attaquer les problèmes les plus difficiles en astrophysique comme le magnétisme solaire, d’utiliser les meilleurs algorithmes et méthodes numériques accessibles », précise Dr. Pierre Kestener (CEA/MdS) participant activement au développement du code dans le projet.
De plus, « l'extension de cette approche intégrée aux jumeaux solaires ayant des vitesses de rotation et une composition chimique différentes permettra également de mieux comprendre le magnétisme et l'activité stellaires » ajoute Allan Sacha Brun, notamment en préparation de la mission de l’ESA PLATO qui partira juste à la fin du projet vers 2026 pour laquelle, comme pour Solar Orbiter, le DAp-AIM a fourni de l’instrumentation.

Le site de Wholesun

Contact : Allan-Sacha BRUN

Référence : Brun, A.~S., Miesch, M.~S., Toomre, J., ApJ, 614, 1073-1098 (2004); Augustson, K., Bruin, A.S., Toomre, J., ApJ 809, 149, (2015) ; Gudiksen B., Carlsson, M. et al. A&A, 531,154, (2011)

Pour en savoir plus : L'origine du cycle solaire dévoilée

Gauche : Simulations 3D globale de la dynamo solaire avec le code ASH (Brun et al. 2004, Augustson, Brun et Toomre 2015), en rouge le champ toroidal de polarité positive. Droite : Simulation 3D locale de la surface solaire avec le code Bifrost (Gudiksen, Carlsson et al. 2011, en rouge les flots descendants, et au-dessus en couleur les lignes de champs magnétiques). Un des buts du projet Whole Sun est de fusionner ces deux simulations en une seule cohérente et intégrée.