L’instrument METIS de l’ELT (Extremely Large Telescope) franchit l’étape de la conception préliminaire

L’instrument METIS de l’ELT (Extremely Large Telescope) franchit l’étape de la conception préliminaire

Le 18 Mai dernier, l’ESO a formellement clos la revue de design préliminaire de l’instrument infrarouge thermique ELT METIS. Suite à cet important jalon, l’instrument passe en phase de conception finale qui devrait se terminer avec la revue de conception finale (FDR) en 2022 avant d’entamer la phase finale de construction.

Vues d’artiste montrant le futur télescope géant ELT de 39m de diamètre à Cerro Armazones (Chili). A titre de comparaison, la taille des plus gros télescopes existants (VLT, 8m) est montrée en silhouette.

Un telescope avec des performances inégalées

Au même titre que les instruments HARMONI et MICADO, l’instrument METIS est un instrument ELT de première génération à vocation généraliste qui observera dans les bandes L-M-N de l’infrarouge thermique (3.5-13 μm). Cet instrument utilisera pleinement la formidable résolution angulaire d’un miroir de 39m de diamètre dont les images seront corrigées de la turbulence atmosphérique par de systèmes d’optique adaptative extrême. Il observera la matière tiède (300-3000K) dans divers environnements depuis le milieu interstellaire et les zones centrales de galaxies actives, des disques proto-planétaires de notre galaxie dans lesquels des planètes géantes sont entrain de se former (voir l'actualité du 02 juin), jusqu’aux petits corps éloignés de notre système solaire. METIS sera doté d’une résolution angulaire 5 fois supérieure à celle d’instruments identiques sur un télescope de 8m et 6 fois supérieure à celle du télescope spatial JWST observant aux mêmes longueurs d’ondes. En outre, cet instrument bénéficiera aussi d’une sensibilité 25 fois supérieure à celle des instruments actuels, combinée avec des performances uniques en termes de haut contraste par l’utilisation de coronographes à masque de phase de nouvelle génération. Ces performances lui permettront d’être un instrument de choix pour la caractérisation des exo-planètes déjà découvertes.

L’IRFU CEA participe à plusieurs lots dans le projet METIS :

Caractérisation des détecteurs des voies scientifiques L-M-N

En bande L,M, l’instrument METIS s’appuiera sur des détecteur Hawaii-2RG de télédyne, assemblés en mosaïque de 2*2 détecteurs pour le spectromètre et d’un détecteur simple pour l’imageur. Les Hawaï 2RG sont des détecteurs de 2000*2000 pixels, chaque pixel ayant 18µm de côté, utilisant la technologie HgCdTe. Le détecteur GEOSNAP (télédyne), de technologie semblable sera quant à lui utilisé pour l’imagerie en bande N.

Le CEA prendra part au programme de caractérisation scientifique de l’ensemble des détecteurs afin d’en étudier le comportement et les performances selon leurs paramètres de fonctionnement (températures, tensions de polarisations etc). L’optimisation de ces paramètres sera alors mise en œuvre dans l’instrument METIS pour en garantir les meilleures performances scientifiques.

Mosaïque de détecteurs Haxaii2RG (gauche) et détecteur GEOSNAP (droite)

Design et fabrication des cryomécanismes généralistes (ICAR)

Basé sur l’expérience acquise par l’Irfu sur les mécanismes cryogéniques (VISIR, MIRI, EUCLID), le mécanisme ICAR sera déployé en 12 exemplaires dans METIS, pour actionner les roues de l’imageur, du spectromètre ou du système d’imagerie de l’optique adaptative.

Le mécanisme ICAR a été profondément revu par rapport à celui d’EUCLID pour en réduire drastiquement les coûts de fabrication. Cet objectif est atteint puisque son coût récurrent devrait se situer à 40k€ (gain d’un facteur 2,5 par rapport au mécanisme EUCLID). Un prototype a été construit en 2019 et il fait l’objet d’une campagne de tests cryogéniques.

Prototype du mécanisme ICAR

Design et fabrication du cryomécanisme du dé-rotateur de champ.

Afin de limiter au maximum le bruit de fond instrumental, et tenter d’atteindre la limite de diffraction de l’ELT, l’instrument METIS a choisi de positionner son dérotateur* de champ à l’intérieur du cryostat. Le CEA a donc en charge la conception, la fabrication et les tests du mécanisme du dérotateur, caractérisé par des rotations continues à des vitesses très lentes (0,005°/s à 0,15°/s), avec une précision de positionnement de 7 arcsec et fonctionnant à 60K. Ceci constitue une première technologique, puisqu'à ce jour, aucun instrument n’utilise de dérotateur cryogénique.

* Le dérotateur permet de garder le champ de vue fixe au niveau de l'instrument grâce à un dispositif à miroirs, champ qui autrement tournerait lors de la rotation de la Terre

Vue CAO du mécanisme du dérotateur de champ

Tests de validation de performances des coronographes de type AGPM en bande N

Fabriqués par l'Université d'Uppsala sous couvert le l'ULG (Université de Liège), partenaire du projet METIS, ces masques sont essentiels et d'une haute importance stratégique pour l'exploitation scientifique de l'instrument METIS et en particulier pour l'étude des exo-planètes. Afin de pouvoir tester ces composants, le CEA a procédé à une mise à niveau de la station de tests développée initialement dans le contexte de l’instrument JWST MIRI. Cette station est à présent équipée d’un détecteur haute capacité et de sources laser permettant d’obtenir des images de source ponctuelle avec un rapport signal/bruit de 1000 en 1s conformément aux pré-requis. La première image d'une source ponctuelle éteinte par le coronographe a été obtenue lors de tests préliminaires en mars 2020.

Contacts Irfu : Eric Pantin (DAp), Jean-Christophe Barrière (DIS)

Images de première lumière du banc de test des coronographes de type AGPM bande N pour METIS. La première image est obtenue hors du masque. Les images centrales et à droite sont obtenues en s’approchant du centre du masque, provoquant une atténuation de la source principale d’un facteur ~70. Une source secondaire à gauche de la source principale est produite par double réflexion dans un éléments optique et peut servir à simuler une source faible proche d’une étoile.

Le projet METIS a bénéficié, pour ces lots, du soutien financier et technique du CEA-IRFU, du DIM-ACAV, et de l’INSU (CSAA).

Pour en savoior plus:

Le consortium METIS est composé de :

  • NOVA (Ecole néerlandaise de recherche en astronomie représentée par l'Université de Leiden, Pays-Bas),
  • l'Institut Max Planck d'astronomie (MPIA, basé à Heidelberg, Allemagne),
  • l'Université de Cologne (Allemagne),
  • Centre technologique d'astronomie du Royaume-Uni (UKATC, à Edimbourg, Ecosse, Royaume-Uni),
  • KULeuven (Belgique),
  • centre de recherche du CEA Paris Saclay (Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives, France),
  • Centre d'astrophysique et de gravitation (CENTRA), Université de Lisbonne, Portugal),
  • l'ETH Zürich (Suisse),
  • A* (un partenariat autrichien représenté par l'Université de Vienne,
  • l'Université d'Innsbruck,
  • l'Université de Graz,
  • l'Université de Linz et le RICAM Linz, Académie autrichienne des sciences, Autriche),
  • l'Université du Michigan à Ann Arbor (États-Unis),
  • l'Institut d'astronomie et d'astrophysique Academia Sinica à Taipei (Taiwan)
  • et l'Université de Liège (Belgique),
  • avec des contributions de l'ESO.