Science effectuée avec GOLF
Science achieved with GOLF
Deux types d'ondes se propagent dans le Soleil. Les ondes acoustiques sont engendrées par les fluctuations de pression induites par la granulation de surface. Les ondes de gravité proviennent principalement de l’interface entre la convection et la radiation et sont régies par la gravité (voir figure 1). Seuls les modes acoustiques ont fourni une information exploitable actuellement. GOLF permet de regarder le Soleil globalement et de détecter les modes pénétrant jusqu’au coeur. L’ensemble des modes acoustiques existants, en fait des millions, est accessible à l’observation. Ceci permet de reconstruire les propriétés du plasma solaire de la surface jusqu’à une fraction du coeur nucléaire, en s’appuyant sur deux quantités : la vitesse du son et la décomposition des modes en composantes liées à la rotation et au champ magnétique des couches traversées.
Fig 1 : Domaine fréquentiel des deux types de modes. Les modes acoustiques apparaissent au-dessus de 0,5 mHz, le domaine des modes de gravité est situé entre 10 µHz et 0,5 mHz. Sont surimposés sur les observations de GOLF, le bruit instrumental et les bruits solaires associés à la granulation (GR), aux régions actives (RA) et à la supergranulation (SGR). L'analyse des données GOLF est décrite dans l'article Garcia et al., 2005. La vitesse du son dans le milieu se déduit de la mesure du temps acoustique de propagation d’un mode acoustique, à condition de disposer d’un modèle proche pour définir la taille de la cavité traversée. Elle est directement reliée aux quantités thermodynamiques par la relation c2=gP/r où g, P et r désignent respectivement l’indice adiabatique du gaz, la pression et la densité.
-
L'apport des modes acoustiques de bas degré
-
L'extraction de la vitesse du son
La mesure de pratiquement tous les modes acoustiques (excepté les harmoniques 1 et 2 pour les modes de bas degré) a rendu possible l'extraction de la vitesse du son depuis la surface jusqu'à 6% du rayon solaire, un succès qui était à peine espéré au lancement de SOHO. Cette information utilise les deux instruments GOLF et MDI et permet d'obtenir une précision de quelques 10-4 en valeur absolue de la vitesse dans la région nucléaire (Turck-Chièze et al., ApJ, 2001, 555, L69 ; Couvidat et al., ApJ, 2003, 599, 1434). Cependant, comme le montre la figure 2a, la résolution spatiale est encore insuffisante (6% pour le rayon, 10% pour la masse) dans cette région, due aux propriétés des modes acoustiques ; en conséquence, le profil de densité n'a pas encore bien été correctement établi. Une meilleure détermination du profil de matière de matière nécessite la détection des modes de gravité.
Ce progrès considérable a permis de discuter des ingrédients constituants les modèles solaires classiques (Turck-Chièze et al., Solar Physics, 2001, 200, 323). Ces mesures ne sont pas compatibles avec l'idée d'un coeur convectif à faible mélange au centre. Nous avons aussi été capable de tester la sensibilité de nos modèles aux sections efficaces d'intéraction. La précision atteinte aujourd'hui permet d'apporter une forte contrainte sur la section efficace proton-proton. Nous n'avons pas mis en évidence des anomalies qui pourraient être dues à des effets d'écrantage nucléaire non standard. Ainsi, au cours des dix dernières années, les données sismiques ont apporté un cadre pour vérifier la physique introduite dans les équations de structure et l'introduction de nouveaux processus physiques qui sont essentiels pour interpréter les observations. Finalement, il a été possible de calculer un modèle sismique en parfait accord avec le profil de vitesse du son obtenu grâce aux ondes acoustiques dans la zone radiative (figure 2b). Ce modèle est utile pour contraindre la température centrale et le flux de neutrinos émis et aussi pour améliorer la prédiction des modes de gravité. Ce modèle va donc devenir la nouvelle référence quand on examinera les différences entre les modèles solaires classiques (c'est-à-dire avec l'évolution des abondances) et quand on introduira des phénomènes non pris en compte jusqu'ici.
-
Fig 2a: Comparaison du carré de la vitesse du son extraite des mesures acoustiques et celle dún modèle solaire de référence. La figure est en fonction de la masse et montre le progrès remarquable obtenu grâce aux instruments GOLF et MDI. La résolution spatiale est limitée par les propriétés du mode acoustique (Turck-Chièze et al., Solar Physics, 2001, 200, 323).
Fig 2b : Différence entre le carré de la vitesse du son extraite des ondes acoustiques observées par GOLF et MDI et le carré de celle des modèles solaires : nouveaux modèles standards incluant une réduction de plus de 30% du CNO (ligne continue avec les barres d'erreur et ligne trait-point) et pour le modèle sismique (trait continu) (Turck-Chièze et al., PhRvL, 2004, 93, 211102).
-
La rotation de la région radiative
Les modes acoustiques de bas degrés permettent d'obtenir des informations concernant la region radiative solaire. La dynamique de cette région est plus difficile à extraire car le nombre de modes acoustiques pénétrant cette région est plus faible, de même que le nombre de multiplets. De plus, l'excitation stochastique rend l'extraction de l'information difficile sur des durées d'observation limitées. L'utilisation des données de GOLF a offert la possibilité de n'utiliser que des modes de basse fréquence faiblement perturbés par l'excitation stochastique et les effets du cycle solaire. La conclusion est que la région radiative tourne de façon quasi rigide et uniforme jusqu’au bord du coeur nucléaire avec une période d’environ 27 jours, c’est-à-dire intermédiaire entre la rotation de l’équateur et des pôles (voir figure 3). Dans la région nucléaire, les incertitudes de mesure sont du même ordre de grandeur que l’information provenant de la région concernée.Une image complète de la rotation nécessite donc la détection de modes de gravité qui présentent une très grande sensibilité à cette région. La mesure des composantes de 2 ou 3 d’entre eux permettrait déjà de répondre à plusieurs questions importantes.
Fig 3 : Vitesse de rotation en fonction du rayon dans le Soleil. Vers l’extérieur, la vitesse de rotation dépend de la latitude, indiquée ici pour chaque courbe. Mesure obtenue par l'instrument MDI/SOHO et le réseau GONG. Au-dessous de la tachocline (0,7 rayon solaire), la région radiative tourne de façon rigide et uniforme . La remontée dans le coeur nucléaire est suggérée par les candidats modes de gravité (Couvidat et al., ApJ, 2003, 597, L77).
-
La recherche des modes de gravité
Ces ondes, principalement piégées dans la région radiative, ont un comportement évanescent dans la région convective. Aussi, leur vitesse au niveau de la photosphère est très faible, rendant très difficile leur détection. Les efforts entrepris depuis vingt ans avec les réseaux d’instruments au sol se sont avérés infructueux. Le satellite SOHO est donc une opportunité exceptionnelle grâce à sa localisation au point de Lagrange L1, où les conditions en température et radiation sont très stables, à sa longévité, environ onze ans, et à la présence à son bord des trois instruments sismiques qui observent le Soleil continûment. Aucune détection crédible n’a été répertoriée dans la recherche de pics uniques. Celle de multiplets a été prometteuse car elle baisse le seuil de détection et offre la possibilité d’apporter des informations sur la rotation du coeur. Les travaux actuels ont permis d’identifier, avec plus de 98 % de confiance, des structures candidates pour être les premiers modes de gravité (voir figure 4). Les vitesses mesurées sont aussi petites que 2 mm/s à la surface du Soleil. Ce niveau de vitesse revient à identifier, de la Terre, une cerise qui oscillerait à la surface de la Lune. Par conséquent, les conditions d’observation pour une telle recherche sont très importantes. En fait, au point de Lagrange, le principal perturbateur est le Soleil lui-même,car la granulation de surface et l’activité solaire perturbent la mesure. C’est pourquoi les astrophysiciens du CEA ont bon espoir de confirmer ou d’infirmer ces potentielles détections en Soleil calme avant l’arrêt de SOHO prévu en 2009, dès que l’activité solaire va décroître (le prochain minimum est prévu en 2007-2008). Les signatures identifiées actuellement correspondent à des signaux présents pendant 5 ans. De plus, le recherche continue à plus basse fréquence où les modes de gravité ont un comportement asymptotique tel que les modes d'un même degré sont espacés en période (Garcia, Turck-Chièze et al., en préparation). S’ils étaient avérés, ils révéleraient un coeur central à rotation rapide avec un axe d’inclinaison différent du reste de l’étoile. Ce résultat constituerait une nouvelle page d’histoire solaire car le coeur nucléaire aurait conservé un vestige des conditions initiales. C’est à la fois un champ d’investigation passionnant pour les années à venir et également une opportunité pour tous les ingénieurs et techniciens de transformer l’essai en construisant une nouvelle génération d’instruments encore plus performants pour mesurer la dynamique temporelle du coeur nucléaire, le projet GOLF-NG/DynaMICS
Fig 4 : Un des candidats aux modes de gravité détecté à 90 % de confiance comme un triplet après 1200 jours d’observation (figure du haut, traits orange et bleu) puis comme un quintuplet après 2 000 jours (figure du bas, traits vert et violet). Sur la figure du haut, apparaît en surimposition la position théorique de 2 modes de gravité de degrés l = 2 et 3 correspondant au modèle sismique (Turck-Chièze et al., ApJ, 2004, 604, 455). Ce candidat a été encore détecté à plus de 98% de confiance après 3000 jours d'observation (Turck-Chièze et al., Proceedings of the SOHO 14 / GONG 2004 Workshop, ESA SP-559, 85). |