NFS (Neutrons For Science) est une aire expérimentale de l’installation Spiral2 (Ganil, France) qui fournira des faisceaux de neutrons de grande intensité pour des énergies allant de 0.5 à 40 MeV. Ces derniers seront créés par collision des faisceaux de particules chargées de Spiral2 avec des cibles de carbone, béryllium ou lithium, grâce à un élément clé de NFS, le convertisseur. La conception de celui-ci constitue un réel défi puisqu’il doit résister à une grande puissance déposée par les faisceaux intenses de Spiral2. Dans ce cadre, l’Irfu a conçu et réalisé un convertisseur capable de soutenir une puissance de 2 kW. Les faisceaux de neutrons de NFS permettront d’obtenir des informations dans un domaine en énergie encore peu exploré. La physique fondamentale, la modélisation des réactions nucléaires et les bases de données nucléaires bénéficieront ainsi d’un outil unique.
NFS (Fig. 1) utilisera les faisceaux de particules de hautes intensités du Linag Spiral2 afin de produire des faisceaux de neutrons via la réaction 7Li(p,n)7Be ou la cassure du deuton sur une cible de béryllium ou de carbone. Deux types de faisceaux seront alors disponibles : des faisceaux mono-énergétiques et des faisceaux blancs (spectre continu en énergie). Des intensités de l’ordre de 106 neutrons/cm2/s (à 5 m du convertisseur) pour des énergies de quelques centaines de keV jusqu’à 40 MeV sont attendues, offrant de nouvelles opportunités expérimentales. Par exemple, une équipe de l’Irfu développe actuellement un spectromètre, appelé Falstaff, qui une fois installé à NFS, permettra d’étudier la fission des actinides.
L’Irfu a réalisé pour le projet NFS un système robotisé appelé « ensemble convertisseur » (Fig. 2) pour produire les faisceaux de neutrons avec des spectres blancs. L’ensemble permet de charger une cible de carbone ou de béryllium d’épaisseur variable, puis de piloter sa rotation et de surveiller son intégrité sous 2 kW de deutons. Une gestion à distance permet de garantir le chargement et le déchargement de la cible à l’intérieur de la chambre à réaction jusqu’à sa mise en stockage. Ce projet couvre un large éventail de compétences à l’Irfu : gestion de projet, calculs neutroniques, radioprotection, calculs thermiques, conception mécanique, réalisation mécanique, électrotechnique, automatisme, alignement, montage et mise au point.
La conception mécanique couvre quatre équipements répondant à la fois aux contraintes d’accès radiologique et aux contraintes de fonctionnement thermique du convertisseur :
Les calculs thermiques et thermomécaniques ont été au cœur des choix de conception. Un modèle de simulation thermique a été réalisé, prenant en compte les phénomènes de conduction et de rayonnement qui interviennent entre les pièces de l’ensemble cible et de l’extracteur. Compte tenu de la forte puissance déposée, 2 kW maximum, la température de la cible, selon son matériau, peut atteindre 940°C. La dimension, ainsi que la vitesse de rotation de la cible (~2000 tr/mn), ont été choisies afin de gérer la densité de puissance déposée par le faisceau en la répartissant sur une couronne du disque. L’échange thermique se fait sur plusieurs étages : par rayonnement de la cible tournante vers des parois « froides », puis par conduction à travers un contact élastique vers l’extracteur lui-même refroidi par convection grâce une circulation d’eau à 12°C. Par ailleurs, la cible a été isolée thermiquement de son support par des composants en céramique limitant ainsi le transfert de puissance vers la motorisation (température < 100°C). Les contraintes thermomécaniques qui apparaissent par dilatation et rotation restent ainsi maîtrisées pour garantir l’intégrité de la cible.
L’électrotechnique/Instrumentation: la surveillance de la rotation de la cible est cruciale. Elle est assurée par deux chaînes d’instrumentation distinctes afin de répondre aux exigences de sûreté puisque la cible est un EPS (Élément Participant à la Sûreté). Une grande réactivité de détection (en 100 ms) des défauts de vitesse est nécessaire, afin de conserver l’intégrité de la cible (coupure faisceau < 250 ms). La vitesse de la cible est régulée à ± 0,2 % et le déclenchement des défauts est à ± 10 %.L’environnement très sévère a constitué un défi technologique pour les composants retenus (rayonnement, vide, haute température, miniaturisation, maintenance, taux de panne…). Cet environnement a conduit à la robotisation de toutes les actions et manipulations du convertisseur ; de son confinement à son utilisation.
Contrôle-commande: l’un des objectifs principaux du système de contrôle commande est de piloter le convertisseur lorsque la salle d’expérience est verrouillée et interdite d’accès. Cela permet d’assurer qu’une cible irradiée est, soit positionnée dans la chambre à réaction en rotation dans l’axe du faisceau, soit confinée à l’arrêt dans son pot en plomb. Ce système assure aussi l’interface opérateur pour les demandes de chargement et déchargement de cible.
Le système de contrôle commande choisi s’appuie sur les outils standardisés par l’Irfu. Un automate programmable gère l’ensemble des axes motorisés avec précision (0,1 mm sur 2 m) et de manière fiable et répétitive. Le logiciel de supervision Muscade® assure l’interface homme-machine. En effet, il met en œuvre un automate programmable industriel (200 paramètres à gérer par axe) qui est couplé à des variateurs de vitesse. Le système s’interface avec les automates du Ganil de façon à prendre en compte les contraintes d’environnement de l’expérience.
L’ensemble convertisseur a été monté, réglé et testé à l’Irfu puis dans la salle NFS au Ganil. Des photos de l’ensemble sont présentées sur la Figure 3.
Contacts: D. Doré, J.-C. Toussaint
Les différentes compétences présentes à l’Irfu ont été intégrées afin de réaliser l’ensemble convertisseur de NFS. La livraison au Ganil a eu lieu fin mars 2018. Le convertisseur est maintenant assemblé, réglé et a été testé en juin 2018. Le faisceau du Linag de Spiral2 est attendu dans la salle du convertisseur NFS pour 2020. Lors de la montée en puissance, les mesures des capteurs de température seront comparées aux prévisions des calculs thermiques afin d’en permettre la validation.
Retrouvez le travail des équipes de l'Irfu à travers cette vidéo:
• Structure de la matière nucléaire › Dynamique des réactions nucléaires
• Le Département d'Électronique des Détecteurs et d'Informatique pour la Physique (DEDIP) • Le Département de Physique Nucléaire (DPhN)
• Laboratoire des systèmes de détection (LASYD) • Laboratoire de Développement et d’Intégration de Systèmes de Contrôle (LDISC) • Laboratoire des Relations Industrielles (LRI) • Laboratoire d'études et d’intégration en génie électrique (LEIGE) • Laboratoire d'études et d'applications des réactions nucléaires (LEARN)
• Spiral2