Visualisation en 3D de notre cosmographie. Notre galaxie la Voie Lactée est située au centre et l’ensemble de la carte couvre une région de dimension 1 milliard d’années-lumière. Les surfaces grises et rouges représentent la structure de La Toile Cosmique, parmi laquelle se distingue le Mur du Pôle Sud. En forme d’arc, il enlace le bassin d’attraction gravitationnelle de Laniakea, notre superamas de galaxies, représenté en bleu. Les vides cosmique du Répulseur du Dipôle et du Répulseur du Point Froid sont représentés par des volumes vert sombre semi-transparents.
Voilà un mur que les White Walkers ne franchiront pas...
Une collaboration internationale rassemblant l’Irfu (CEA, Université Paris-Saclay), l’Institut d’Astronomie de l’Université d’Hawaï, le LPC (Université Clermont Auvergne), l’IP2I (Université Claude Bernard de Lyon), et le Racah Institute of Physics (Université Hébraïque de Jérusalem), a découvert une immense structure dans la distribution des galaxies, baptisée "Mur du Pôle Sud".
Grâce à une méthode fondée sur les champs de vitesses des galaxies, cette région du ciel, jusqu'à lors inconnue car masquée par des nuages moléculaires et de poussières situés en avant plan dans notre galaxie, apporte une nouvelle pièce au puzzle de la toile cosmique de notre Univers proche. Cette toile cosmique est constituée de nœuds connectés par des filaments, séparant des vides. Les galaxies sont entrainées des vides vers les filaments puis vers les attracteurs gravitationnels situés aux nœuds de la toile. Les filaments, pris en sandwich entre des vides, peuvent prendre une forme aplatie pour constituer des murs.
Le Mur du Pôle Sud a une section rectiligne immense (220 Mpc) aux extrémités desquelles il s'incurve pour épouser la frontière de Laniakea.
Ces travaux sont publiés dans APJ journal https://doi.org/10.3847/1538-4357/ab9952
La recherche en cosmologie a été marquée ces quarante dernières années par la découverte de structures de plus en plus grandes, à mesure que les instruments permettaient de sonder des régions de l’Univers de plus en plus vastes et lointaines :
Dans cette histoire des découvertes des grandes structures, une région du ciel est demeurée essentiellement inexplorée, une « Astra Incognita », dans la direction du Pôle Sud Céleste (c’est-à-dire le long de la ligne définie par l’axe de rotation de notre planète, dans la direction Australe). Cette région, située aux limites observationnelles des télescopes implantés dans les observatoires situés les plus au sud, tel que l’Observatoire de Siding Springs en Australie, est caractérisée par la présence d’épais nuages de poussières galactiques, tel que le Complexe de nuages dans la constellation du Caméléon, ou la présence des Nuages de Magellan, deux galaxies satellites de la nôtre, qui masquent des pans entiers du ciel profond. Les relevés de galaxies ont donc été pénalisés par la présence de trous dans leurs couvertures du ciel dans cette région la plus australe.
Cependant, une nouvelle étude, basée sur l’analyse des mouvements des galaxies, a permis d’explorer pour la première fois cette région. En effet, le mouvement de ces dernières, généré par la gravitation, trahit la présence de matière y compris dans des régions non observées directement. En utilisant la toute dernière génération du catalogue de vitesses de galaxies, Cosmicflows-3, qui compte environ 18 000 mesures de vitesses de galaxies ou groupes de galaxies, une reconstruction de la distribution de la matière en 3D dans le ciel austral a révélé la présence d’un mur inconnu jusque-là : le Mur du Pôle Sud. Il est de morphologie et de dimension similaires à celle du Grand Mur de Sloan, tout en étant deux fois plus proche de nous. Son cœur est situé dans la Constellation du Caméléon, et il comprend un long filament quasi rectiligne connectant des secteurs particulièrement denses dans les constellations de l’Oiseau de paradis et du Lièvre. Se prolongeant en s’incurvant pour atteindre le secteur de la constellation d’Eridan près de l’équateur céleste, il décrit un immense arc qui enlace les frontières du Sud de Laniakea, le bassin d’attraction gravitationnel dans lequel est situé notre galaxie, la Voie Lactée.
Visualisation des courants cosmiques. Le champ de vitesse en 3D est représenté à l’aide de lignes de courants initiées dans les régions de haute densité, telles que le Mur du Pôle Sud, représentées par une surface grise.
Les lignes de courant se terminant à l’attracteur de Shapley, au Grand Attracteur, et à l’Attracteur du superamas de Persée-Poisson, sont représentées en noir, en bleu et en rouge, respectivement.
Une carte du ciel centrée sur le Pôle Sud Céleste représentant le Mur du Pôle Sud. Les contours de trois niveaux du champ de densité cartographient les régions plus denses que la moyenne de l'Univers: un niveau bas en gris, un niveau intermédiaire et un niveau élevé en nuances de rouge. Le Mur du Pôle Sud est adjacent à la zone d'obscuration causée par la poussière galactique, et il est situé en vis-à-vis du superamas de Shapley au travers de la zone d'obscuration. Les positions des pics du champ de densité sont indiquées et nommées en utilisant les noms des constellations dans lesquelles ils sont situés, + leur vitesse de récession cosmologique en unités de 1000 kilomètres par seconde, qui constitue un indicateur de leur distance. Par exemple, au cœur du Mur du Pôle Sud, le pic de densité Chamaeleon+11.8 se trouve à une vitesse de récession de 11800 km/s, soit une distance de 157 Mégaparsecs, soit environ 500 millions d’années-lumière.
Poursuivant cette entreprise de cartographie du Cosmos, la collaboration travaille désormais à la préparation de la future génération de catalogue de vitesses de galaxies, Cosmicflows-4 constitué d'environ 30 000 galaxies, avec l’inclusion de nouvelles mesures obtenues dans l’Hémisphère Nord avec les radiotélescopes de Green Bank et Arecibo .
Contact Daniel Pomarède (Irfu/CEA), Hélène Courtois (Université Lyon 1)
« Cosmicflows-3 : The South Pole Wall » Daniel Pomarède, R. Brent Tully, Romain Graziani, Hélène M. Courtois, Yehuda Hoffman, Jérémy Lezmy, ApJ (2020).
historique des faits marquants :
• Modélisation, calcul, analyse des données › Méthodes de modélisation et de visualisation
• Le Département d'Électronique des Détecteurs et d'Informatique pour la Physique (DEDIP)
• Laboratoire d'ingénierie logicielle pour les applications scientifiques (LILAS)