05 août 2008
BaBar découvre l'êta-b
l'état fondamental du bottomonium.

η b, c’est le nom de la particule récemment découverte par les physiciens de l’expérience BaBar. Cet état fondamental du «bottomonium», ensemble des particules formées d’un quark b et d’un antiquark b , était recherché depuis plus de 30 ans et a été identifié dans les désintégrations de la particule Y(3S), un état excité du bottomonium, à partir des dernières données prises en 2008 par l’expérience BaBar. La mesure précise des caractéristiques de cette nouvelle particule est déterminante pour le test et la détermination des paramètres des modèles théoriques de l’interaction forte.

 

 

Après près de neuf années de prise de données à une énergie correspondant à la masse du méson Y(4S), principalement en vue de l'étude des mésons beaux B et de la violation de la symétrie CP dans leurs désintégrations, l’expérience BaBar, située sur l'anneau de stockage PEP-II de l'accélérateur linéaire de Stanford (SLAC) en Californie, a pris, au cours des trois premiers mois de l'année 2008, ses dernières données à une énergie légèrement inférieure, correspondant à la masse des mésons Y(3S) et Y(2S). Le bouquet final !

 

 
BaBar découvre l'êta-b

Le site du SLAC.

 

Analysant les désintégrations d'environ 110 millions de mésons Y(3S), l'expérience BaBar a découvert l'état fondamental du bottomonium, famille des états liés formés d'un quark b et d'un antiquark b qui comprend les mésons Y(nS). Cette particule, appelé ηb, était recherchée depuis la découverte du bottomonium en 1977.

 

 

Les deux quarks constituant l'objet ont la même masse, et la structure du spectre des états excités est donc semblable à celui du positronium (état lié formé d’un électron et d’un positon) ou du charmonium (état formé d’un quark c et d’un antiquark c). Les deux quarks sont liés par l'interaction forte, mais la chromodynamique quantique (QCD) qui la décrit ne se prête pas facilement au calcul des états liés. L'interprétation du spectre du bottomonium nécessite donc l'emploi de modèles théoriques plus ou moins directement inspirés de QCD. Ceux-ci prédisaient une très faible différence de masse entre l'Y(1S) et l' ηb, variant de 35 à environ 100 MeV/c2, un effet dû à leur spin, appelé « séparation hyperfine ». De même, les prédictions de la théorie sur la probabilité de désintégration du Y(3S) en ηb et photon ne sont pas très précises et varient  de 10-4 à 10-3. Il était donc important de découvrir cette pièce manquante du puzzle des hadrons, et de mesurer ses caractéristiques avec précision.

 

 
BaBar découvre l'êta-b

Spectre de l’énergie des photons après soustraction du bruit de fond continu. Les points représentent les données, tandis que la courbe rouge modélise la contribution des désintégrations des mésons χbJ(2P), la courbe verte la production par ISR de l’Y(1S) et la courbe bleue la production du signal de méson ηb.

On s’attend à ce que le méson ηb se désintègre selon un très grand nombre de modes, chacun avec une probabilité de désintégration très faible, et affecté d'un bruit de fond élevé. La recherche de l’ηb a donc été faite de façon inclusive, en ne « reconstruisant » que le photon accompagnant la désintégration du Y(3S) en ηb. L'énergie de ce  photon « de recul » serait de 911 MeV pour un ηb ayant une masse de 9,4 GeV/c2. L'analyse est rendue difficile par la présence d'un bruit de fond important et continu de photons issus d’autres processus présents dans les collisions e+ e- et donnant un spectre monotone en énergie. Mais elle est surtout confrontée à deux sources de bruit de fond produisant des pics en énergie proches de la région du signal recherché. En premier lieu, les nombreuses désintégrations de χbJ(2P) en Y(1S) et photon produisent un pic dans le spectre d’énergie du photon proche de 770 MeV. Enfin, la production directe de mésons Y(1S) dans la collision e+ e-, avec rayonnement dans l'état initial (ISR), produit un autre pic moins intense mais plus proche du signal, à 860 MeV. Ces contributions sont visibles sur le spectre de l’énergie des photons représenté sur la figure 1. Des études sur des échantillons de contrôle, particulièrement ceux acquis à une énergie de faisceaux éloignée de toute résonance connue, permettent de connaître avec précision la forme du pic dû aux ISR. L'incertitude induite sur les paramètres de l’ηb est alors minime. Comme le dit Philippe Grenier qui a dirigé cette analyse : « La compréhension de ces deux processus a été absolument cruciale, en particulier celle du pic d'ISR qui se confond en partie avec le signal ».

 

 

Le méson ηb est donc observé à une masse de 9388,9 +3,1-2,3 ± 2,7 MeV/c2, avec une signification statistique d'environ 10 déviations standard.  La probabilité de désintégration du Y(3S) en un ηb et un photon  a été mesurée et vaut :  (4,8 ± 0,5 ± 1,2) 10-4.

 

 
BaBar découvre l'êta-b

Le DIRC, un élément du détecteur BaBar construit par l'Irfu

L'observation de l’ηb est une étape importante de l'exploration du secteur bottomonium des hadrons, et la mesure précise de ses caractéristiques une composante déterminante du test et de la détermination des paramètres des modèles théoriques décrivant l’interaction forte.

 

 

 

BaBar est une collaboration internationale à laquelle contribuent cinq laboratoires français, quatre de l'IN2P3 (le LAL Orsay, le LAPP Annecy, le LPNHE Paris 6-7, le LLR Ecole polytechnique) ainsi que le CEA Irfu.

 

 

Contact : Georges Vasseur, Irfu/SPP

 

 
#2476 - Màj : 17/03/2010

 

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