11 juin 2013
Nucifer : Premiers Neutrinos détectés à Saclay !
Nucifer : Premiers Neutrinos détectés à Saclay !

Schéma du détecteur Nucifer. Les antineutrinos interagissent dans le liquide cible pour produire un positron et un neutron qui sont détectés en coïncidence. Les muons cosmiques qui perturbent la mesure sont détectés par le véto muon et éliminés lors de l' analyse des données. Des blindages en polyéthylène et en plomb permettent de réduire les bruits de fond neutrons et gammas.

Le détecteur Nucifer vient de détecter ses premiers neutrinos à Saclay auprès du réacteur Osiris. Fruit d’une collaboration de différentes directions du CEA (DSM, DEN et DAM), du CNRS et du Max Planck Institut für Kernphysik, il s’agit de l’expérience ‘neutrino’ la plus proche d’un cœur compact de réacteur nucléaire jamais réalisée.  Placé à quelques mètres d’un réacteur de recherche (Osiris) ou d’une dizaine de mètres d’un réacteur de puissance(Chooz), ce détecteur permet un suivi en temps réel de la composition du combustible, en particulier de la quantité de plutonium produite dans le cœur.

Il est considéré par  l’AIEA comme un démonstrateur pour la surveillance des futures installations nucléaires civiles.

Au-delà de l’application à la surveillance des centrales, premier objectif de ce projet, Nucifer pourrait aussi fournir un premier test de l’anomalie des antineutrinos de réacteurs . En effet, aucune expérience n’a jamais détecté de neutrinos à une si courte distance d’un cœur compact (seulement 7m !). Cette configuration est adaptée à la mise en évidence d’un nouvel hypothétique 4ème type de neutrino d’une masse proche d’un eV/c². Elle pourrait apporter des éléments nouveaux en réponse au déficit en antineutrinos observé par une vingtaine d’expériences depuis plusieurs décennies.

 
Histoire du détecteur

 

La conception du détecteur date de 2006 et sa réalisation a débuté mi 2008. Ce détecteur, qui utilise comme milieu de détection un liquide scintillant dopé au gadolinium, est le fruit d’une collaboration des services techniques et des services de physique de l’Irfu (SEDI, SENAC, SIS, SPhN, et SPP), de la DEN (SERMA) et du laboratoire Subatech-Nantes de l’IN2P3. Le Max-Planck-Institut für Kernphysik a rejoint la collaboration en 2012.

 

Les études de sureté et de sécurité  ayant montré la faisabilité du projet,  le déploiement de celui-ci a été accepté par les autorités du centre de Saclay et a pu débuter mi 2011 par des travaux d’aménagement et la mise en place de blindages dans les locaux du réacteur Osiris. L’autorisation de l’ASN (Autorité de Sureté Nucléaire) a été nécessaire pour procéder au remplissage du détecteur et le mettre en exploitation.

Après un premier remplissage en mars 2012, possible grâce à la mobilisation de toute l’équipe de l’Irfu, assistée par le personnel d’Osiris et sous la surveillance des pompiers de la FLS, le détecteur a été calibré à l'aide de sources radioactives et placé dans ses blindages de plomb et de polyéthylène qui ont été refermés autour de lui.

 

 
Nucifer : Premiers Neutrinos détectés à Saclay !

Opération de remplissage du détecteur Nucifer dans l’enceinte du bâtiment réacteur Osiris du CEA-Saclay.

Nucifer : Premiers Neutrinos détectés à Saclay !

Première détection de neutrinos à Saclay. La ligne rouge représente l’évolution de la puissance thermique du réacteur Osiris en fonction du temps. Les points de mesure représentent le taux journalier de candidats neutrinos détectés, moyennés sur des périodes d’environ 2 jours. Lorsque le réacteur est à l’arrêt nous mesurons le bruit de fond induit par les rayons cosmiques (ligne verte). En fonctionnement, le signal neutrino suit l’évolution de la puissance. Nous mesurons un taux compatible avec la prédiction, 137 par jour (ligne bleue). Les barres d’erreurs importantes attestent de l’existence d’un bruit de fond encore trop important induit par le réacteur qu’il faudra atténuer par l’ajout d’un nouvel écran de plomb entre le coeur du réacteur et Nucifer.

Prises de données à Osiris

Les premiers résultats obtenus ont mis en évidence une transmission optique du liquide scintillant de qualité inférieure à ce qui était requis pour l’expérience, ne permettant pas d’atteindre l’ensemble des objectifs. Ces mesures ont également mis en évidence une source de bruit de fond qui n’avait pas été identifiée au préalable, liée à la circulation de l’eau du circuit primaire du réacteur à proximité du site d’expérience.

Une opération de mise à niveau de Nucifer a donc été réalisée entre 2012 et 2013 qui a consisté à changer le liquide scintillant. Grace à son expertise dans le domaine, acquise lors de sa participation au projet Double Chooz, le MPIK a rejoint la collaboration Nucifer et fourni ce liquide.
Un blindage de plomb supplémentaire a également été ajouté. Ainsi protégé des bruits de fond extérieurs, Nucifer a pu commencer sa quête d’antineutrinos lors des cycles de fonctionnement du réacteur au mois d’avril et mai 2013.

Le nouveau blindage de plomb installé en mars 2013 a joué son rôle escompté. Le bruit de fond gamma induit par la désactivation de l'eau du circuit primaire a été réduit d'un facteur 500. Cela a permis d’extraire le signal neutrino, en accord avec le taux attendu.

 

Néanmoins, pour mener à bien les programmes de monitoring du réacteur au jour-le-jour (contraintes sur la composition uranium/plutonium) ainsi que le test de l'anomalie réacteur (recherche du 4ème neutrino) il faudra réaliser une dernière mise à niveau des blindages en direction du cœur pendant le long arrêt d'Osiris d’ici fin 2013. La mesure de la quantité de plutonium produite dans le cœur et la chasse au 4ème neutrino pourront alors être lancée pour une période d’environ une année !

 
#3333 - Màj : 08/11/2017

 

Retour en haut