28 août 2017
L’atlas de la toile cosmique des vitesses maintenant disponible
L’atlas de la toile cosmique des vitesses maintenant disponible

Laniakea en surimpression sur la toile cosmique des vitesses. ©D. Pomarède/ Y. Hoffman/ R.B. Tully/ H. Courtois

 

Au cours des 13,8 milliards d'années d'histoire de l'Univers, des forces attractives et répulsives ont agi pour concentrer la matière dans certaines régions et en laisser d'autres de plus en plus vides. Pour la première fois, une cartographie des grandes structures de l’Univers, y compris celles non observables par les méthodes classiques, a été réalisée en étudiant les mouvements de milliers de galaxies. Ces travaux, impliquant l'Irfu et l’Institut de Physique Nucléaire de Lyon sont parus le 10 août 2017 dans The Astrophysical Journal.

 

Une collaboration internationale, incluant l'Irfu et l’Institut de Physique Nucléaire de Lyon (Université Claude Bernard Lyon 1/CNRS), vient de reconstruire une structure 3D de l’Univers grâce à l’étude de près de 8 000 galaxies dont on connaît précisément les distances mais aussi les vitesses. Cette reconstruction inclut même des zones jusque-là non observables.

En mesurant les mouvements de milliers de galaxies, il est possible de cartographier la matière, qu’elle soit « ordinaire » ou – pour la plus grande partie – « noire ». La matière présente dans l’Univers n’est pas distribuée uniformément : certaines régions la concentrent au sein de galaxies ; tandis que d’autres régions en sont quasiment vides. Les galaxies sont entrainées par des filaments vers les attracteurs gravitationnels et s'éloignent, donc apparaissent repoussées, par des régions vides. Cette distribution résulte en un réseau de nœuds que l’on nomme la toile cosmique, historiquement définie grâce aux seules positions des galaxies.

La structure de cette toile cosmique est cohérente avec les  routes déduites par les chercheurs au moyen de la mesure des vitesses des galaxies. De plus, cette toile cosmique des vitesses révèle une cartographie de certaines régions jusque-là restées Terra Incognita, telle la « zone d’obscuration galactique », où plusieurs filaments ont été découverts. Cette zone restait inaccessible pour l’observation des galaxies et la détermination de leurs positions en raison de la poussière du disque de la Voie lactée, qui cache les galaxies situées au-delà.

 

La visualisation est au cœur du processus de cartographie de la toile cosmique et de sa structure tridimensionnelle complexe. Cette architecture intriquée a pu être étudiée et comparée grâce aux capacités de visualisation du logiciel SDvision développé à l'Irfu.

 

Comment reconstruire la toile cosmique des vitesses? 

Les propriétés de compression et de dilatation des flots de matière ont été décrites à travers l’analyse d’un objet mathématique appelé « tenseur de cisaillement ». Ainsi, une compression de ce flot selon trois directions perpendiculaires révèle la présence d’un nœud de la toile, où la matière se concentre, tandis qu’une dilatation générale suivant trois directions trahit la présence d’un vide, dont la matière s’éloigne. La situation intermédiaire avec compression suivant deux directions et dilatation dans la troisième signale elle un filament (voir Figure et vidéo)

 

 

 
L’atlas de la toile cosmique des vitesses maintenant disponible

Visualisation du réseau de la toile cosmique des vitesses. Les lignes de courant visualisent les flots de matière qui courent le long des filaments (en gris) et convergent vers les zones de compression dans les nœuds (en rouge). Le point d’origine (à l’intersection des 3 vecteurs rouge, bleu et vert) correspond à la position de la Voie lactée. ©D. Pomarède/ Y. Hoffman/ R.B. Tully/ H. Courtois

La publication scientifique est accompagnée par une vidéo de visualisation(ci-dessous). L’article propose également une innovation technique : une visualisation interactive permettant au lecteur d’explorer librement et en immersion la toile cosmique des vitesses et de la comparer avec la distribution des galaxies ; cette technologie s’appuie sur la plateforme de partage de visualisations interactives Sketchfab issue d’une start-up française.

 

La combinaison de cette reconstruction de l’Univers à partir des vitesses avec la cartographie des positions des galaxies conforte le modèle standard en cosmologie : les grandes structures de l’Univers se sont développées à partir de la croissance de minuscules fluctuations initiales sous l’influence notamment de la gravitation.

Avec les mouvements des galaxies, les chercheurs peuvent déterminer comment est distribuée la masse totale de l’Univers, constituée de matière ordinaire et de matière sombre cinq fois plus abondante. Reconstruisant alors la toile cosmique des vitesses, ils apportent à la communauté d’astrophysiciens une nouvelle façon d’appréhender la carte cosmique existante et de la compléter.

 

Un atlas de l’Univers constamment mis à jour

Telles nos cartes de navigation, l’atlas de l’Univers est également constamment mis à jour, notamment par cette même équipe internationale qui en 2014 a découvert les frontières du continent de galaxies dans lequel nous vivons : Laniakea. En 2017 les chercheurs ont d’abord mis en évidence une « super autoroute cosmique » sur laquelle voyagent les galaxies satellites et qui les focalise vers les grandes galaxies avant d’identifier la raison du déplacement de La Voie lactée à 630 km/s : le Dipole Repeller. Et aujourd’hui, cette définition de la toile cosmique des vitesses a été rendue possible grâce à la collecte étendue et standardisée de distances (obtenues avec différents télescopes) et de vitesses de galaxie regroupées dans la série de catalogues CosmicFlows.

L'analyse actuelle est basée sur une étude des 8 000 galaxies du catalogue Cosmicflows-2. Déjà, une nouvelle collection de 18 000 distances et vitesses de galaxie est disponible dans le catalogue Cosmicflows-3. Son analyse permettra de révéler une toile cosmique des vitesses riche de détails encore plus fins.

 

 

Références : The Cosmic V-Web, D. Pomarède, Y. Hoffman, H.M. Courtois, R.B. Tully, The Astrophysical Journal, 845 (2017) p. 55, https://doi.org/10.3847/1538-4357/aa7f78

Contacts: Daniel Pomarède (Irfu/DEDIP), Hélène Courtois (Univ Lyon 1)

Voir aussi: The Dipole Repeller; Laniakea


cette actualité a fait l'objet d'un communiqué de presse CEA/Université Lyon

 
#4152 - Màj : 23/05/2018

 

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