22 février 2023
La muographie : une pionnière dans l’étude non-invasive des réacteurs nucléaires
La muographie : une pionnière dans l’étude non-invasive des réacteurs nucléaires

Télescope à muons installé sous le centre du réacteur G2 pour la première mesure de muographie. © CEA

Dans le cadre d'un projet collaboratif entre la DES/DDSD et la DRF/Irfu initié en 2017, la muographie a démontré son impressionnante capacité à imager l’intérieur de très grandes structures comme le réacteur nucléaire G2 à Marcoule, à l’arrêt depuis 1980. En plaçant 4 télescopes à muons à 27 positions stratégiques successives sous le réacteur, l’équipe du CEA a pu réaliser une cartographie tridimensionnelle de sa structure interne avec un temps de prise de données de seulement quelques jours par projection. Ces résultats correspondent à 1100 jours de prise de données entre 2020 et 2022. Ils ouvrent de nouvelles perspectives pour l'inspection et la surveillance des sites nucléaires pendant toute leur durée d'exploitation comme dans leur phase de démantèlement, contribuant ainsi à la sûreté nucléaire.

 

Lors d’une première phase qui a débuté en février 2020, les équipes avaient pu valider le potentiel de la technique en identifiant par exemple des différences dans la structure entre les résultats issus des données et les modélisations réalisées à partir des plans originaux de l’installation, datant de 1958. Les muons qui traversent la structure interagissent avec la matière. Plus la matière est dense, plus le rapport entre le flux de muons sortant et le flux entrant est faible. Les équipes avaient ainsi pu comparer le flux de muons récoltés au modèle 3D établi à partir des plans. Un excès de muons avait été observé dans la simulation par rapport aux données réelles correspondants à des composants du réacteur qui n’ont été pas définis dans le modèle 3D ou ont été définis avec une densité plus faible que la réalité.

Une seconde phase, terminée en mars 2022, durant laquelle les 4 détecteurs ont occupé 27 positions, a permis aux équipes de réaliser la reconstruction 3D du réacteur, grâce à une adaptation d’algorithmes issus de l’imagerie médicale qui utilise elle-aussi une combinaison d’image 2D pour obtenir une image en 3D. 

 

Muography of the G2 Nuclear Reactor from Daniel Pomarède on Vimeo.

La reconstruction nécessite de nombreuses informations issues de simulations, sur l’angle des muons incidents, leur spectre en énergie mais aussi l’énergie perdue en fonction des matériaux. Ces informations permettent ensuite d’appliquer l’algorithme de reconstruction sur chaque voxel  de 25 cm de côté constituant le volume total de 40x30x35 mètres cubes modélisant le réacteur.

 

Grâce à la reconstruction 3D, il est possible d’identifier les différents éléments qui composent le réacteur. La surdensité (en rouge) correspond au bloc de chargement avec ses milliers de tuyaux métalliques. Le cube de graphite visible au centre est entouré d’une structure cylindrique en béton. Enfin la sous-densité (en bleu à gauche) est induite par les tuyaux de refroidissement.


Les résultats expérimentaux concordent remarquablement avec les modèles CAO revus lors de la première phase. La densité reconstruite pour le béton et pour le graphite a une valeur compatible avec les densités connues de ces deux matériaux. La résolution spatiale horizontale est estimée grossièrement de l'ordre de quelques dizaines de centimètres à partir des plus petits détails visibles, à savoir les tuyaux de refroidissement de 80 cm de diamètre.

 

La dernière campagne de prises de mesure a donc permis une reconstruction 3D non invasive de bonne qualité avec seulement quelques jours de prise de données pour chacune des 27 projections. Des résultats très encourageants pour la communauté de la muographie et l’étude des grandes structures.


Contact Irfu : Sébastien Procureur, David Attié, Hector Gomez

Contact DES :


Actu CEA : https://www.cea.fr/presse/Pages/actualites-communiques/sciences-de-la-matiere/telescope-muons-physique-particules-demantelement-nucleaire.aspx 
 

Publication : https://www.science.org/doi/10.1126/sciadv.abq8431 

 
#5102 - Màj : 24/02/2023

 

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