Le satellite INTEGRAL
Le satellite INTEGRAL, « Laboratoire International pour l’Astronomie du Rayonnement Gamma » (acronyme pour INTErnational Gamma-RAy Laboratory), est un observatoire spatial de l’Agence Spatiale Européenne (ESA) pour l’étude des rayons gamma cosmiques, dont le lancement est prévu en octobre 2002 par une fusée russe Proton depuis le cosmodrome de Baikonour, au Kazakhstan.
Cet observatoire à rayons gamma comporte deux télescopes principaux : – un imageur à rayons gamma baptisé IBIS (acronyme pour Imager on Board the Integral Satellite), caméra capable de produire des images du ciel gamma avec une précision inégalée – un spectromètre baptisé SPI (pour SPectromètre pour Integral) pour mesurer très précisément l’énergie des rayons gamma cosmiques ISGRI (Integral Soft Gamma-Ray Imager), la caméra de basse énergie du télescope IBIS, a été conçue et réalisée au DAPNIA (CEA/DSM), sous la maîtrise d’oeuvre du Service d’Astrophysique. Le DAPNIA a également contribué à la réalisation et à l’étalonnage du spectromètre SPI. |
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Schéma de l’imageur IBIS (cliquer pour agrandir) |
L’imageur IBIS
A la différence des rayons de lumière visible qui peuvent être focalisés par des lentilles ou des miroirs, les rayons gamma, extrêmement puissants et pénétrants, ne peuvent pas être focalisés efficacement à courte distance. La formation d’images doit recourir à la technique du « masque codé », un écran à trous situé au dessus d’un détecteur constitué d’une multitude d’éléments sensibles. C’est grâce à cette technique que l’imageur IBIS produira une image du ciel en rayons gamma dont la précision sera meilleure que celle obtenue jusqu’ici. Un masque de tungstène, situé à 3,2 mètres de distance, projetera une image gamma sur deux caméras gamma superposées : – la caméra ISGRI (détecteurs de CdTe) couvrant le domaine d’énergie de 15 keV à 2 MeV. – la caméra PICsIT (détecteurs de CsI) couvrant le domaine d’énergie de 170 keV à 10 MeV. |
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Schéma des deux caméras superposées d’IBIS (cliquer pour agrandir) |
La caméra ISGRI
Le 6 juillet 2001 a eu lieu la « revue de livraison » du modèle de vol de la caméra gamma ISGRI. Cette caméra équipera le télescope spatial IBIS embarqué sur le satellite INTEGRAL. Haute sensibilité, finesse des images et performances spectroscopiques font de la caméra ISGRI un élément clef du programme d’observation d’INTEGRAL. Couvrant plus de 2600 cm2, elle est la première caméra gamma au monde basée sur l’utilisation de détecteurs semiconducteurs non-refroidis. Les plus de 16 000 détecteurs indépendants en tellurure de cadmium (CdTe) de cet instrument exceptionnel, réalisé par le CEA avec le soutien du CNES, utilisent les derniers développements de la cristallogénèse et de la microélectronique. ISGRI a été livré le 12 juillet à Milan pour y être montée dans IBIS.
L’expérience acquise au SAp avec la construction et l’utilisation de la caméra gamma de SIGMA nous a poussé à chercher dans la mise en œuvre de matériaux nouveaux les clefs de performances supérieures tant dans le domaine de l’imagerie que dans celui de la spectroscopie. Le Tellurure de Cadmium (CdTe) est un matériau remarquable à tous égards. Ce semi-conducteur très dense est très efficace pour arrêter les photons gamma et mesurer précisément leur énergie. Ne nécessitant pas de refroidissement, il permet de concevoir une caméra de grande dimension formée de l’assemblage d’une myriade de petits détecteurs (4×4 mm), chacun formant un point d’image.
La faisabilité d’un tel instrument passe par la réalisation d’un circuit intégré complexe permettant de traiter les signaux délivrés par chacun des détecteurs élémentaires. Une puce ad-hoc a donc été développée permettant de mesurer les signaux de quatre détecteurs. La caméra ISGRI est extrêmement modulaire; elle est formée de 8 modules identiques totalement indépendants, chacun de ces modules résultant lui-même de l’assemblage de 128 polycells.
Polycell (vue de face) |
Polycell (vue de revers) |
Modules de 128 polycells |
Le polycell, véritable brique de base d’ISGRI, comprend 16 détecteurs collés sur une céramique portant quatre puces. Doté de pattes comme un composant électronique classique, le polycell est soudé sur le circuit imprimé du module. L’imagerie produite a une résolution spatiale de 4 mm, indépendante de l’énergie. Les performances spectrales sont aussi bien meilleures (énergie mesurée avec une précision de 8% à 122 keV) que celles obtenues avec les cristaux scintillants de PICsIT, et même meilleures que celles de SIGMA. |
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Résolution en énergie |
La première image gamma à haute résolution
Pour la revue de livraison, les huit modules constituant le plan détecteur de la caméra avaient été montés sur une plate-forme de test avec de larges espaces entre eux pour en faciliter le montage. Lors de l’assemblage final sur le télescope IBIS, les modules seront montés côte à côte de telle sorte que l’étendue des zones mortes sera dix fois plus faible. La caméra s’est révélée en parfait état de marche, témoin cette superbe image d’une copie du discobole.
Cette statuette en bronze avait été placée entre ISGRI et une source radioactive de cobalt 57 produisant des photons gamma à une énergie de 122 kiloélectron-volt. Les photons peinent à traverser le bronze, très absorbant à cette énergie, et l’ombre de la statuette se projette en ombre chinoise sur le plan des modules ISGRI. Notons que le disque, plus mince, absorbe moins les photons que le bras, plus épais, de l’athlète. La source est placée à 60 cm au dessus du centre de la caméra, et l’on observe que le taux de comptage (l’éclairement) décroît sensiblement du centre aux bords qui sont plus éloignés de la source. Les points noirs dans l’image correspondent aux pixels défaillants (détecteurs bruyants). Leur faible nombre, une centaine, soit moins de 0,6% du total, justifie la confiance placée en ce type de détecteurs et illustre la qualité de la fabrication : la spécification était d’avoir moins de 5% de détecteurs bruyants.