Eléments de la mosaïque de détecteurs Micromegas « bulk » pour les chambres à projection temporelle de l’expérience T2K au Japon
Les détecteurs gazeux fondés sur le concept Micromegas, conçus à l’Irfu, prennent position depuis quelques années dans la détection de particules et de rayonnement pour la recherche en physique, et présentent un fort potentiel pour l’instrumentation nucléaire, biomédicale et industrielle. Les efforts récents de R&D ont abouti à de nouveaux procédés de fabrication qui améliorant la performance et le champ d’application de ces détecteurs. Cette seconde génération de Micromegas est déjà mis en place dans plusieurs expériences de physique internationales qui ont recueilli d’excellents résultats depuis l’automne 2008.
Développé depuis 19951 , le concept de détecteurs gazeux à micro-grille Micromegas (Micromesh Gaseous Detectors) a donné lieu à a donné lieu à de dizaines des publications et des présentations dans les conférences internationales et à trois brevets d’invention CEA, et à un grand nombre d’applications pour les expériences de physique en recherche fondamentale2 et appliquée3.
Micromegas est un détecteur gazeux à ionisation comportant deux zones caractéristiques séparées par une microgrille : dans l'espace de conversion, les particules chargées à détecter ionisent le gaz, et les électrons ainsi libérés sont guidés vers la microgrille par un champ électrique modéré, pour la traverser et entrer dans l'espace d'amplification. Dans l'espace d'amplification, un champ électrique très élevé crée un régime d'avalanche qui conduit à une forte multiplication du nombre d'électrons primaires, et à la production d'un signal électrique mesurable sur l'anode. Le gain du détecteur dépend directement de la distance microgrille-anode, et la maîtrise de la géométrie de la zone d'amplification, d'une épaisseur de quelques dizaines de microns, est cruciale pour la résolution en énergie.
Dans la première génération de détecteurs, des techniques traditionnelles d'assemblage mécanique étaient utilisées pour la mise en place de la microgrille et le positionnement des plans formant les différents espaces sensibles. Ces techniques montrent des limitations pour la taille et la forme du détecteur, et demandent de nombreuses opérations. Dans un programme de développement associant l'Irfu et le Cern, de nouvelles méthodes ont été mises au point pour simplifier la construction et élargir du même coup les possibilités d'application. L'effort a notamment porté sur la fabrication en un seul tenant de l'espace d'amplification, pour conduire aux techniques "bulk" et "microbulk".
Dans le procédé « bulk », les techniques industrielles de laminage et de photogravure utilisées pour les circuits imprimés électroniques sont utilisées pour produire en un seul tenant l’assemblage des éléments principaux du cœur du détecteur. Après une série d’opérations -laminage d’un film photosensible et d’une grille textile, masquage, insolation, développement- un film constituant l’espace d’amplification est créé. Le processus met en place un réseau de piliers espaceurs, répartis régulièrement sur la surface, qui solidarise la microgrille et le circuit imprimé de base portant les anodes de lecture et maintient du même coup leur distance constante. Ce procédé d’assemblage semi-industriel permet de produire régulièrement des modules de détection de grande taille, stables et peu coûteux, et de les décliner dans des versions minces et flexibles.
Dans le procédé « micro-bulk », la zone d’amplification et de mesure du détecteur est produite à partir d’un film mince de kapton métallisé sur les deux faces. La microgrille étant réalisée sur une des faces métallisées du film, ce procédé ne nécessite pas l’opération de laminage d’une grille textile comme dans le procédé « bulk ». En s’affranchissant des contraintes d’épaisseur et d’irrégularité du textile métallique, il permet de produire des détecteurs encore plus minces dotés d’une excellente résolution en énergie.
Cette nouvelle technologie prometteuse inventée récemment (un brevet CEA-CERN a été deposé par I. Giomataris et R. De Oliveira) est en cours de développements intenses.
L’expérience CAST se propose d’étudier l’émission possible des axions produits au cœur du Soleil. Le principe consiste à orienter vers le Soleil un aimant du LHC (champ magnétique : 9.4 Tesla, longueur : 10 mètres). Si le Soleil émet des axions, ces particules interagissent avec les photons virtuels de l’aimant et produisent des photons réels mous d’environ 3.5 keV. Initialement le projet CAST a utilisé un détecteur type Micromegas, une CCD et deux détecteurs à fils type TPC. Poussée par la performance du nouveau détecteur la collaboration a décidé de remplacer la TPC par deux détecteurs Micromegas. Depuis le début de cette année les trois détecteurs sont installés et le résultat est remarquable : grande stabilité et un niveau de bruit de fond qui atteint des records <<10-5/keV/cm2/s. Les deux nouvelles technologies sont employées: Bulk et microBulk.
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Pour les 3 chambres à projection temporelle (TPC) du détecteur proche de l’expérience neutrino T2K au Japon, les détecteurs d’extrémité, d’une surface sensible totale de 9 m2, sont constitués de mosaïques de modules Micromegas de 34*36 cm2, produits suivant le procédé bulk.
Ces détecteurs sont en phase de production, et ont donné pleine satisfaction lors de la première intégration en septembre 2008 à Triumf (Vancouver), où ils ont été testés sur faisceau avant l’installation sur site au Japon à partir de 2009. Pour les 120000 canaux de mesure, l’ensemble de la chaîne de traitement de signal –circuit intégré frontal spécifique, électronique de proximité, logiciel d’acquisition, logiciel de reconstruction des traces– est conçu et produit à l’Irfu.
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Dans le cadre des actions de R&D pour les détecteurs auprès des futurs collisionneurs à électrons envisagés pour la physique des particules (ILC, CLIC), le programme européen EUDET met en place l’environnement de test d’un « grand prototype » du trajectographe TPC. L’élément d’extrémité Micromegas, encore conçu en technologie bulk, a été testé avec succès à DESY (Hamburg) en octobre 2008. Ce détecteur vise des résolutions spatiales extrêmement ambitieuses atteignant 50 µm, et expérimente des technologies d’anodes résistives pour la répartition de charge et l’optimisation de la reconstruction spatiale des traces. Un concept de détecteur microTPC encore plus avancé, qui associe un Micromegas à un circuit intégré VLSI pixellisé réalisant la mesure et l’analyse du signal électronique (circuit TimePix du CERN), est aussi mis en œuvre dans ce contexte.
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Un prototype pour le détecteur de traces central de la future expérience CLAS12 à Jefferson Lab (Virginie) a été testé sur site en octobre 2008. Ce détecteur doit à terme former un ensemble multicouche pour la mesure des traces chargées dans un solénoïde, sous un champ magnétique de 5 Tesla. Une nouvelle réalisation amincie en technologie bulk a permis de produire un démonstrateur courbé, capable de se conformer au format cylindrique attendu, et présentant une masse très faible sur le passage des particules. Les tests d’octobre 2008 ont validé le fonctionnement sous champ magnétique élevé, le champ électrique appliqué pour la collection des charges permettant de contenir la portée des effets magnétiques sur la résolution spatiale.
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Un nouveau concept de moniteur de flux de neutrons extrêmement fin, fondé sur le procédé micro-bulk, et destiné à l’analyse du faisceau de neutrons de l’expérience NTOF du CERN, a été validé en octobre 2008 auprès de la source de neutrons Gelina à GEEL en Belgique. Le moniteur testé comporte deux éléments micro-bulk placés en séquence, qui portent des dépôts de Bore et d’Uranium pour la conversion des neutrons. Tirant parti d’une excellente résolution temporelle, il permet de qualifier précisément par temps de vol leur spectre d’énergie. La technologie micro-bulk, encore amincie pour cette application, confère une excellente transparence à ce détecteur interposé dans le faisceau.
Ce détecteur a été installé avec succés le 10 novembre sur le dispositif n_TOF au CERN pour le redémarrage du faisceau de neutrons (premier faisceau depuis quatre ans).
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Dans le cadre des études pour la future TPC de la collaboration R3B (Reactions with Relativistic Radioactive Beams) sur l'installation de physique nucléaire FAIR (GSI, Darmstadt), des détecteurs prototypes réalisées en technologie bulk ont été testés sur site en novembre 2008. Les détecteurs, caractérisés sur des faisceaux d'ions lourds de carbone et nickel, étudient notamment le concept d'anode résistive, visant l'amélioration de la résolution spatiale par partage de charge et la résistance aux claquages électriques.
Ces premiers prototypes se sont très bien comportés en faisceau, tant sur les aspects claquages que sur la qualité des signaux, et l’uniformité des gains.
Contacts:
Pour coordonner l’effort futur en R&D, la communauté internationale des détecteurs gazeux s’est récemment regroupée au sein du projet RD51, sous l’égide du CERN. Cette initiative, dans laquelle l’Irfu est très bien représenté, regroupe les porteurs des différentes technologies de détecteurs gazeux à microstructure (GEM, Micromegas).
A l’Irfu, la recherche sur les détecteurs Micromegas est conduite principalement au Service d’Electronique, des Détecteurs et d’Informatique. Impliqués dans les initiatives de R&D et la spécification, les physiciens expérimentateurs de l’institut prennent ensuite la responsabilité scientifique des projets de détecteurs, pour l’application dans les collaborations internationales de physique des particules et de physique nucléaire.
Contacts:
1. Micromesh Gaseous Structure, I. Giomataris, Ph. Rebourgeard, J.P. Robert & G. Charpak, NIM A376 1996 (29)
2. détecteurs de traces pour l’expérience COMPASS, spectromètre de faisceau KABES pour NA48, détecteurs de neutrons pour NTOF, détecteurs de rayonnement X pour CAST.
3. diagnostics de tirs laser pour la DIF (projet DEMIN), détecteur scellé pour mesure neutronique en réacteur nucléaire pour la DEN (projet PICOLLO).
• Détection des rayonnements › Détecteurs pour la physique des 2 infinis › MPGD Activities
• Le Département d'Électronique des Détecteurs et d'Informatique pour la Physique (DEDIP) • Le Département de Physique des Particules (DPhP) • Le Département de Physique Nucléaire (DPhN)