08 janvier 2020
Recherche de désintégrations rares : les cristaux à base de molybdène à l'essai au laboratoire souterrain de Modane
Actualité de l'IN2P3

L’expérience internationale CUPID Mo menée par des laboratoires français de l’IN2P3 et du CEA/IRFU, teste depuis avril dernier l’usage de cristaux à base de Molybdène pour détecter des doubles désintégrations beta sans émission de neutrinos. L'expérience monte progressivement en puissance et montre dès à présent un fond proche de zéro dans la zone d'intérêt, ce qui est très prometteur. Les scientifiques de la collaboration faisaient un point à l'occasion de l'inauguration officielle les 11 et 12 décembre 2019.

 

La double désintégration beta sans émission de neutrinos est une sorte de graal poursuivi par les physiciens depuis 80 ans. Si cette désintégration prédite par certaines théories était observée alors cela donnerait entre autre des indications précieuses et très recherchées sur la nature et la masse des neutrinos. Cependant, depuis le temps que les physiciens et physiciennes sont à sa recherche, cette désintégration reste introuvable. C'est pourquoi une nouvelle génération de détecteurs est en train de voir le jour. L'un d'eux, proposé par la collaboration CUPID-Mo emmenée par Andrea Giuliani du CSNSM, avec des laboratoires de l’IN2P3 et du CEA/IRFU, consiste à utiliser des détecteurs de type bolomètres à base de cristaux scintillants contenant du Molybdène 100.

 
Recherche de désintégrations rares : les cristaux à base de molybdène à l'essai au laboratoire souterrain de Modane

Le bolomètre scintillant CUPID-MO installé sur le site de EDELWEISS

Double capacité de détection


Cet élément radioactif produit en effet des doubles désintégrations beta à un niveau d'énergie moins contaminé par le bruit de fond, et il est inclus dans des cristaux très purs et transparents. Cette dernière propriété ajoute donc la possibilité de détecter les émissions ou passages de particules dans le cristal de deux façons différentes, à la fois par l'échauffement infinitésimal du cristal (principe du bolomètre) et par l'émission de lumière. Il sera plus facile ainsi d'identifier les doubles désintégrations dans le cristal et surtout de rejeter la source principale du fond radioactif induit par des particules alpha provenant de contaminants proches à la surface des détecteurs. La technologie est testée depuis avril dernier dans les installations du Laboratoire souterrain de Modane (LSM) et les membres de la collaboration CUPID-Mo ont donc profité de son inauguration officielle les 11 et 12 décembre pour faire un bilan d'étape.

 

Un fond proche de zéro


Une publication à 0,54 kg/an [1], laissait déjà présager que le bruit de fond serait nul à l'énergie de la double désintégration beta. Les nouveaux résultats à 1,4 kg/an présentés à l’inauguration, donnent à penser que ce sera bien le cas. Mais pour en savoir plus sur la zone d'énergie de la double désintégration beta il faudra attendre l'arrêt de l'expérience en mars 2020 et dépasser 2 kg/an ce qui devrait également fournir in fine le meilleur résultat mondial sur la double désintégration beta sans neutrinos du Mo-100.  A terme, CUPID-Mo sera mis en œuvre à grande échelle dans la collaboration CUPID, avec 1500 cristaux installés au Laboratoire de Gran Sasso en Italie.

 

[1] : First data from the CUPID-Mo neutrinoless double beta decay experiment, nov 2019
 
A propos de l'expérience CUPID-Mo : le développement de la technologie a été accompli par le laboratoire CSNSM, en collaboration avec le CEA/IRFU (ANR LUMINEU, 2012-2017). Les détecteurs ont été assemblés dans une salle blanche au LAL (qui a fait la mécanique en collaboration avec CEA SPEC). Le cryostat, l'électronique et la DAQ sont les mêmes que ceux de l'expérience EDELWEISS, qui cohabite avec CUPID-Mo dans le même cryostat au LSM. L'optimisation de la prise de données est assurée par l’IP2I Lyon et le CEA/IRFU (coordinateur technique). L'analyse est faite par UCB Berkeley, le CSNSM et l’INFN Rome/Milan Bicocca. Les cristaux sont synthétisés en Russie, et le molybdène enrichi a été fourni par le laboratoire ITEP de Moscou. Les capteurs de température sont américains et le know-how sur les cristaux radiopures vient d'Ukraine.

 
#4730 - Màj : 08/06/2020

 

Retour en haut