19 février 2009
Boule de feu aux confins de l’Univers
L’observatoire FERMI découvre le sursaut gamma le plus énergétique jamais détecté

L'observatoire spatial à rayons gamma Fermi [1] a détecté le sursaut gamma le plus violent jamais enregistré, une gigantesque explosion marquant la fin de vie d'une étoile massive. La lumière de l'explosion, captée par Fermi le 16 septembre 2008, a mis 12,2 milliards d'années pour nous parvenir, elle a été produite alors que l'Univers n'était âgé que de 1.5 milliard d'années.  L'énergie totale libérée  en fait l'explosion la plus violente jamais observée dans l'Univers depuis le Big Bang. Observé par Fermi sur plus de six décades en énergie, le sursaut gamma montre des propriétés exceptionnelles. Des nuages de particules chargées ont été catapultés lors de l'explosion, à une vitesse égale à 99.9% de celle de la lumière ! Ces travaux, fruit de la collaboration internationale Fermi à laquelle participent des chercheurs du CEA-Irfu, sont publiés dans la revue Science express du 19 février 2009.

 

Un sursaut extraordinaire sous bien des aspects

Si les sursauts gamma, bouffées éphémères  mais très violentes de rayonnement de haute énergie, sont régulièrement détectés aujourd'hui grâce aux satellites dédiés à leur traque, ils ne finissent pas de surprendre la communauté scientifique. Le sursaut gamma GRB080916C (C pour 3ème Gamma Ray Burst ou sursaut gamma détecté durant la journée du 16 septembre 2008) n'échappe pas à la règle puisqu'il s'avère être grâce aux observations de Fermi le plus énergétique sursaut jamais détecté, même si il ne détient pas le record de distance acquis par GRB080913, surpris trois jours plus tôt. L'énergie dégagée lors de l'explosion de l'étoile surpasse par un facteur cent celle d'une supernova « classique », ceci en considérant que l'émission provient d'un cône étroit pointant vers la Terre.
Le sursaut gamma détecté par Fermi montre également des propriétés remarquables : une durée de l'émission prompte à haute énergie de 23 minutes et un retard de 5 secondes entre les photons les plus énergétiques (supérieure à 100 MeV soit 100 millions d'électron-Volt [2]) et ceux de plus basse énergie (inférieur à 1 MeV). L'hypothèse avancée par les scientifiques pour expliquer ce décalage temporel repose sur des zones d'émissions distinctes. Ils évoquent également la possibilité que différents types de particules sont accélérés par les chocs successifs produits par l'explosion. Ceci est important pour mieux cerner les mécanismes d'accélérations des particules.

 
Boule de feu aux confins de l’Univers

Evolution du sursaut GRB080916C durant les 100 premières secondes après sa détection. Les deux bandes hautes énergie (figures du milieu et du bas) indique clairement un retard dans l'émission gamma observée par rapport à la bande basse énergie (figure du haut).

Pour ce sursaut, le photon le plus énergétique enregistré par Fermi possède une énergie de 13 milliards d'électron-Volts (13 GeV). Produire des photons de cette énergie requiert des particules accélérées à des vitesses proches de la lumière. Effectivement, les observations de Fermi ont permis de calculer que les nuages de plasma catapultés dans l'espace environnant au moment de l'explosion, ont été éjectés à  99.9999%  de la vitesse de la lumière. Les sursauts gamma tel que GRB080916C sont donc de bons candidats pour expliquer l'origine des rayons cosmiques d'ultra-haute énergie, objets d'intenses recherches ces dernières années notamment depuis la mise en service du réseau Auger.

 

Le film de la découverte

Le sursaut a été détecté le 16 septembre 2008 à 00h12 Temps Universel par l'instrument GBM pour « Gamma-ray Burst Monitor  ou moniteur de sursauts gamma». Cet instrument, spécialement dédié à la chasse aux sursauts gamma, scrute en permanence à l'aide de ses 14 détecteurs de grandes régions du ciel. Le télescope LAT, principal instrument de l'observatoire FERMI, est alerté et délivre une minute plus tard les coordonnées célestes de l'événement, permettant sa traque par les satellites à rayons X et les télescopes optiques au sol. Les observations dans la bande visible permettent de déterminer que le décalage vers le rouge de la lumière du sursaut est de 4.24, indiquant que l'explosion a eu lieu il y a 12.2 milliards d'années. Les observations menées dans les domaines X et optiques permettent d'étudier les phases tardives du phénomène, l'émission rémanente, témoin du freinage du plasma de particules éjecté lors de l'explosion lorsqu'il rencontre les nuages interstellaires du milieu environnant.

 
Boule de feu aux confins de l’Univers

A gauche l'image de l'émission rémanente du sursaut GRB080916C obtenue dans un filtre rouge par l'instrument GROND installé sur le télescope de 2.2m à La Silla, Chili. Les observations ontenues par cet instrument ont permis de mesurer la distance du sursaut, 12.2 milliards d'années-lummière. A droite, une image composite prise en rayons X et optique par le satellite de la Nasa SWIFT.


Contact :  

 

Publication :

"Fermi Observations of High-Energy Gamma-Ray Emission from GRB 080916C"
The Fermi collaboration
publé dans la revue Science express du 19 février 2009 ,
 pour une version electronique  (format PDF, 1 Mo)

Voir :

 

   Le communiqué de presse commun CEA/CNRS
   Le communiqué de presse officiel de la NASA (en anglais)

 

Pour en savoir plus :

 

   Le site Fermi du Service d'Astrophysique du CEA/Irfu
   Images gamma de l'Univers (26 août 2008)
   A la découverte de l'Univers extrême (11 juin 2008)

 

Voir aussi
   Le site Fermi de la NASA (en anglais)

Note :

[1] FERMI.  L'observatoire spatial FERMI est le fruit d'une collaboration internationale incluant, en plus des États-Unis qui assurent la maîtrise d'oeuvre du projet, l'Allemagne, la France, l'Italie, le Japon et la Suède. En France, cinq laboratoires sont impliqués dans cette mission : Service d’Astrophysique, laboratoire AIM et Sédi du CEA-Irfu et quatre laboratoires du CNRS : le Centre d’Études Nucléaires de Bordeaux Gradignan (CENBG), le Centre d'études spatiales des rayonnements (CESR, CNRS / Université Toulouse-III), le Laboratoire Leprince-Ringuet (LLR) de l’École Polytechnique,  le Laboratoire de Physique Théorique et Astroparticules (LPTA) de Montpellier.

[2] Electron-volt. L'énergie des rayons X et gamma est souvent évaluée en "électron-volt (eV)". Cette unité correspond à l'énergie communiquée à un électron de charge (e) soumis à une tension de 1 Volt. En unités du système international (SI), 1 eV correspond à  1.6 10-19 Joule. Les rayons (ou photons) de lumière visible ont une énergie d'environ 2 eV, les rayons X  de 0.1 à 511 kilo-electronvolt (keV). Le domaine des rayons gamma se situe au-delà de cette limite. Ils se mesurent en MeV (millions d'électron-volt 106eV), GeV (giga ou milliards 109eV), TeV (tera ou mille milliards 1012eV), etc.....


Rédaction : Christian Gouiffès, Isabelle Grenier

 
#2557 - Màj : 07/06/2011

 

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