Un trou noir géant a détruit une étoile et a ensuite ingurgité ses restes pendant environ une décennie, selon les astronomes. C'est plus de dix fois plus long que tous les évènement analogues observés jusque ici.
Une équipe intenationale de chercheurs, incluant un astrophysicien du Service d'Astrophysique-Laboratoire AIM du CEA-Irfu, a fait cette découverte étonnante en utilisant des données des trois satellites, Chandra X-ray Observatory (NASA), SWift (NASA) ainsi que XMM-Newton (ESA). Les résultats de cette étude sont à paraitre dans la revue Nature Astronomy.
Le trio de télescopes à rayons X en orbite (Chandra-Swift-XMM) a trouvé des preuves d'un "événement de destruction de marées" (TDE Tidal Disruption Event), où les forces de marée dues à la gravité intense d'un trou noir peuvent détruire un objet - comme une étoile - qui passe trop près. Pendant un TDE, certains des débris stellaires sont projetés vers l'extérieur à haute vitesse, tandis que le reste tombe vers le trou noir. Lorsque la matière tombe vers l'intérieur pour être ingérée par le trou noir, elle se réchauffe jusqu'à des millions de degrés et génère une émission de rayons X caractéristique.
"Nous avons assisté à la mort spectaculaire et prolongée d'une étoile", a déclaré Dacheng Lin de l'Université du New Hampshire à Durham, New Hampshire, qui a dirigé l'étude. "Des dizaines d'événements de destruction de marées ont été détectés depuis les années 1990, mais aucun n'est resté brillant aussi longtemps que celui-ci."
L'extraordinaire et longue phase lumineuse de cet événement qui a duré plus de dix ans signifie que, parmi les TDEs observés, celui-ci était soit issu de la destruction d'une étoile la plus massive jamais observée au cours d'un tel événements, soit le premier cas où une étoile plus petite a été complètement avalée.
Vue d'artiste d'un événement de destruction de marées: la destruction d'une étoile par la gravité d'un trou noir massif. Certains des débris stellaires sont projetés vers l'extérieur à des vitesses élevées, tandis que le reste (montré comme le matériau en rouge) devient plus chaud quand il tombe vers le trou noir, générant une émissio de rayons X. Crédit Chandra/NASA
La source de rayons X qui correspond à ce trou noir massif, connue sous le nom abrégé de XJ1500 + 0154 (d'après ses coordonnées), est située dans une petite galaxie à environ 1,8 milliard d'années-lumière de la Terre.
La source n'a pas été détectée dans une observation de Chandra le 2 avril 2005, mais a été détectée dans une observation XMM-Newton le 23 juillet 2005 et a atteint une luminosité maximale dans une observation de Chandra le 5 juin 2008. Ces observations montrent que la source est alors devenue au moins 100 fois plus lumineux dans les rayons X. Depuis lors, Chandra, Swift et XMM-Newton l'ont observée plusieurs fois.
La précision des images du satellite Chandra montre que XJ1500 + 0154 est situé au centre de sa galaxie hôte, l'endroit prévu pour un trou noir supermassif.
«Pendant tout le temps que nous avons observée cet objet, sa luminosité a été en croissance rapide», a déclaré le co-auteur James Guillochon du Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics à Cambridge, Massachusetts. "cela indique quelque chose d'inhabituel - probablement une étoile deux fois plus massive que notre Soleil qui est détruite par le trou noir. "
Cet évènement pourrait permettre de mieux expliquer comment les trous noirs supermassifs grossissent dans l'univers lointain. Si les trous noirs supermassifs peuvent croître aussi rapidement à partir de tels évènements, cela pourrait expliquer comment les trous noirs supermassifs ont pu atteindre des masses environ un milliard de fois plus élevé que le soleil lorsque l'univers avait seulement environ un milliard d'années.
«Cet événement montre que les trous noirs peuvent vraiment croître à des taux extraordinairement élevés», confirme la co-auteur Stefanie Komossa de QianNan Normal University for Nationalities à Duyun City, en Chine.
Basé sur la modélisation par les chercheurs de l'approvisionnement du trou noir, celui-ci devrait être considérablement se calmer dans la prochaine décennie, entrainant une forte diminution de l'émission de rayons X.
Contacts : Pierre-Alain DUC
Publication :
"A likely decade-long sustained tidal disruption event"
Dacheng Lin et al. (2017), à paraitre dans Nature Astronomy (Mars 2017)
pour une version electronique : arxiv.org/abs/1702.00792
Voir : le communiqué de presse Chandra (NASA (en anglais)
Rédaction-Traduction : J.M. Bonnet-Bidaud / Chandra press release
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