L'univers violent sera le thème scientifique prioritaire de la prochaine grande mission spatiale de l'Agence Spatiale Européenne (ESA) qui devrait être lancée en 2028, une thématique dans laquelle le Service d'Astrophysique-Laboratoire AIM du CEA-Irfu est particulièrement impliqué depuis sa création.
A l'issue d'une grande compétition qui a vu la proposition de 31 projets sur 23 thèmes scientifiques différents, le conseil scientifique de l'ESA du 28 novembre 2013 a en effet choisi l'exploration de l'univers chaud et énergétique pour objectif de son prochain grand observatoire spatial, la mission L2, dont le budget sera d'environ un milliard d'euros. La sélection définitive des instruments interviendra courant 2014 mais la mission sera largement basée sur le projet ATHENA+ (Advanced Telescope for High ENergy Astrophysics), un télescope à rayons X proposé par une collaboration de laboratoires européens avec une forte contribution des chercheurs français du CNRS (IRAP, Observatoire de Strasbourg) et du CEA (IRFU).
Dans la suite directe des deux satellites européens XMM-Newton et INTEGRAL, actuellement en orbite, ATHENA+, dont la durée de vie est prévue pour 10 ans, permettra à l'Europe de rester en pointe pour de nombreuses années dans l'étude du rayonnement de hautes énergies de l'univers, allant de la détection des trous noirs à la distribution des galaxies et la formation des grandes structures de l'univers.
Le succès du satellite à rayons X, XMM_Newton, lancé le 19 décembre 1999 et toujours en activité depuis près de quinze ans, a fortement motivé les astrophysiciens à lui trouver un successeur. Les rayons X qui sont arrêtés par l'atmosphère terrestre et ne peuvent donc être captés que depuis l'espace, sont en effet les messagers spécifiques des régions les plus chaudes de l'univers, là ou les températures dépassent les millions de degrés, par exemple lors des explosions d'étoiles, aux abords de trous noirs ou au coeur des galaxies et des amas de galaxies.
ATHENA+ est né d'un projet initial baptisé IXO (International X-ray Observatory) qui aurait du être un projet commun des agences spatiales européenne ESA, étasunienne NASA et japonaise JAXA avant que la NASA ne se retire en raison de difficultés budgétaires. Le projet a été repris et transformé sous le nom d'ATHENA (pour Advanced Telescope for High ENergy Astrophysics) pour être candidat à la première grande mission L1 de l'ESA dont la sélection a eu lieu en mai 2012. Mais la priorité pour cette première grande mission de l'ESA pour les années 2015-2025 a été donnée à la mission planétaire pour l'étude des lunes glacées de Jupiter, baptisée JUICE (JUpiter ICy moons), qui sera lancée en 2022. Cette fois-ci, c'est donc une version légèrement modifiée d'ATHENA, ATHENA+, qui vient d'emporter l'adhésion de l'ESA et d'être désignée comme deuxième mission prioritaire L2 pour un lancement en 2028
L'observatoire spatial ATHENA+ sera constitué d'un télescope à rayons X à incidence rasante faisant converger les rayons X sur deux instruments placés à plus de 12 mètres. Le diamètre et la longueur totale de l'instrument (15 m) ont été calculés très précisément pour pouvoir être emportés dans la coiffe de la fusée européenne Ariane-5.
ATHENA+ est largement inspiré de XMM-Newton, reprenant l'architecture d'un télescope à miroirs à incidence rasante de 12m de longueur focale et de 2 m2 de surface effective, soit plus de dix fois celle de XMM_Newton. L'utilisation de matériaux de nouvelle technologie ultra-legers, dits Silicon Pore Optics (SPO), a permis une réduction notable du poids. Au foyer du télescope seront placés deux instruments, un calorimètre-spectromètre (XMS pour X-ray microcalorimeter spectrometer) pour la mesure très précise de l'énergie des rayons X et un imageur à grand champ (WFI pour Wide Field Imager).
ATHENA sera placé au point de Lagrange L2 du système Terre-Soleil, à 1,5 millions de km de la Terre, dans la direction opposée au Soleil et en dehors des ceintures de radiation, lui permettant des observations ininterompues et dans un environnement protégé.
Parmi les objectif principaux d'ATHENA figurent deux questions esentielles encore à résoudre
- comment la matière s'assemble-t-elle dans l'univers pour former les grandes structres (amas de galaxies et galaxies)
- comment se forment et grossissent les trous noirs géants et quels effets ont-ils sur l'évolution de l'univers.
Bien d'autres études seront également à portée de ce nouvel observatoire spatial européen, notamment l'étude des explosions d'étoiles (supernovae), des objects compacts (étoiles à neutrons, naines blanches), du milieu interstellaire chaud, de la perte de masse des étoiles, etc...
La définition de ces objectifs scientifiques a donné lieu à une réflexion et des études très détaillées auxquelles les scientifiqes du Service d'Astrophysique-Laboratoire AIM du CEA-Irfu ont très largement participé, sous la forme d'une série de publications.
En 2028, ATHENA fournira un accès essentiel à la fenêtre des rayons X, en complément des nouveaux moyens au sol et dans l'espace en cours de développement, comme SKA (Square Kilometer Array), ALMA (Large Millimeter/submillimeter Array), JWST (James Webb Space Telescope), E-ELT (European Extremely Large Telescope), CTA (Cherenkov Telescope Array) qui couvriront les autres fenêtres radio, submillimétrique, infrarouge, optique et gamma.
Contact :
Voir - le communiqué de presse de l'Agence Spatiale Européenne (ESA) (28 novembre 2013)
- le site ATHENA+
- les objectifs scientifiques d'ATHENA+
- "The Hot and Energetic Universe" (fichier PDF)
- The astrophysics of supernova remnants and the interstellar medium (A. Decourchelle, E. Costantini et al.)(fichier PDF)
- The astrophysics of galaxy groups and clusters with Athena+ (S. Ettori, G. W. Pratt, et al.)(fichier PDF)
Voir aussi - les résultats obtenus au CEA-Irfu grâce au satellite XMM_Newton
Rédaction : Jean-Marc Bonnet-Bidaud
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