Une des propriétés très intéressante du rayonnement IR est sa capacité de passer à travers une assez grande épaisseur de matériaux interstellaires, beaucoup plus importante que celle que peut traverser le rayonnement optique. En observant notre Galaxie en IR, on peut ainsi partir à la découverte de régions opaques, jusque-là pratiquement insondables.
Celles qui retiennent plus particulièrement l'attention des astrophysiciens sont les régions de formation des étoiles, celles-ci naissant dans les sites les plus denses des nuages interstellaires.
ISOCAM a entrepris un relevé systématique de quelques-unes de ces régions, afin de permettre de mieux comprendre les premiers stades de la formation et de l'évolution des étoiles. La stratégie adoptée pour explorer ce genre de régions a déjà permis de distinguer immédiatement les objets en formation (proto-étoiles) des étoiles plus évoluées, grâce à l'existence d'un excès d'émission vers 15 microns. Cet excès est sans doute attribuable à un disque d'accrétion, signature de jeunesse d'un astre en formation. Visuellement, cet effet s'observe dans des cartes composites par des différences de couleur entre les objets (Figure 1).
C'est ainsi qu'à la longueur d'onde de 6,75 puis de 15 microns, ISOCAM a pu confirmer que le nuage rho Ophiuchi (compagnon de l'étoile du même nom) est un véritable réservoir de petites étoiles en gestation. La caméra IR a entrepris de pénétrer en profondeur dans ce nuage opaque pour caractériser ces étoiles en formation enveloppées de poussière chauffée. Eloigné de 500 années-lumière de la Terre, rho Ophiuchi est l'endroit le plus proche de nous où des étoiles se sont formées récemment.
Les cartes fournies par ISOCAM ont ainsi permis de révéler la structure complexe de tels nuages, structure probablement liée aux types d'interaction qu'entretiennent les étoiles naissantes avec leur nuage géniteur.
Autre enseignement tiré des images d'ISOCAM, analysées par l'Institut d'astrophysique spatiale d'Orsay : la formation stellaire est un phénomène qui s'auto-régule. Le rayonnement émis par "son étoile" ronge les bords du nuage rho Ophiuchi, en dissociant les molécules qu'il contient. C'est ce "front de destruction" qui sert de régulateur car, rongé progressivement, le nuage ne peut donner naissance à une étoile massive.
Fig 1 : image composite du nuage de formation stellaire rho Ophiuchi. Ce nuage est chauffé par une étoile située hors champ sur la gauche et responsable du long filament brillant à gauche. Sur cette carte, l'émission à 6.75 microns est codée en rouge et celle de 15 microns en bleu. On distingue nettement des variations de couleurs de sources ponctuelles détectées dans ce champ, signe que ces étoiles sont vraisemblablement d'âges différents. (708x694 129Ko )