Afin d'optimiser les performances des systèmes cryomagnétiques, une R&D sur le refroidissement de ces systèmes est activement soutenue au CEA. Différents thèmes de recherche correspondant aux différents types d'aimants supraconducteurs sont menés de front. Des études sur les écoulements diphasiques d’hélium en régime transitoire sont conduites afin de prévoir les phénomènes thermohydrauliques survenant lors de quench d’aimants supraconducteurs refroidis par des écoulements externes fonctionnant, par exemple, en thermosiphon. Pour de plus petits systèmes, nous étudions le couplage entre des boucles de circulation et des cryogénérateurs afin de créer des systèmes autonomes de refroidissement. Enfin, des études sont aussi menées pour comprendre les transferts de chaleur en hélium superfluide à travers des microcanaux représentant les chemins thermiques typiques dans les isolations électriques des aimants d'accélérateur.
Écoulement diphasique d’hélium en régime transitoire
Certains systèmes de refroidissement des aimants de détecteurs pour la physique des hautes énergies sont basés sur des boucles de circulation d’hélium diphasique. Des études expérimentales sont menées afin d’étudier le cas particulier des régimes transitoires de refroidissement de ces grands aimants. Elles sont cruciales puisqu’elles couvrent le scénario où les aimants passent de l’état supraconducteur à l’état normal en dissipant une importante quantité de chaleur. Les résultats expérimentaux montrent que les transferts de chaleur sont améliorés dans les premiers instants (pendant environ 100 ms) après qu’une puissance est dissipée. L’augmentation du coefficient d’échange thermique en paroi est attribuée à une augmentation brutale de l’ébullition nucléée qui accroît les transferts de chaleur. Après le régime transitoire, le coefficient d’échange chute grandement pour les densités de flux de chaleur élevées entraînant l’apparition de l’ébullition en film qui est catastrophique pour le refroidissement. La connaissance de ces phénomènes ainsi que leurs constantes de temps permettra d’optimiser le refroidissement de ces grands aimants.
Boucle thermosiphon autonome composée d’un cryogénérateur (en haut), d’un condenseur (pot en acier inox) et de l’échangeur de chaleur (tube en cuivre vertical de 4 mm de diamètre équipé d’un fil chauffant).
Refroidissement par boucle de circulation diphasique autonome
L’idée de coupler une boucle de circulation naturelle (thermosiphon) avec un cryogénérateur présente plusieurs avantages pour le refroidissement de systèmes cryomagnétiques de taille et de puissance moyennes fonctionnant à basse température (10 W à 4,2 K) ou aux températures de l’azote liquide (100 W à 77 K). Ce couplage combine les avantages d’une boucle de circulation et de la recondensation des vapeurs synonyme d’un gain énergétique important (pas de transport et pas de perte du fluide cryogénique) et rend, en plus, ce mode de refroidissement autonome. On voit l’intérêt d’un tel système placé, par exemple, au fond d’une caverne expérimentale, et surtout pour des applications utilisant les supraconducteurs à haute température critique comme les câbles de puissance ou les électroaimants de nouvelles générations.
Une boucle expérimentale autonome, à la température de l’hélium, a été conçue et instrumentée de façon à étudier ses capacités de refroidissement. Lorsque la puissance dissipée dans le tube échangeur croit, on retrouve les différents régimes thermiques rencontrés en écoulement diphasique : un régime de convection naturelle, un régime d’ébullition nucléée, un régime d’ébullition en film (après un saut de température d’environ 1 K) puis un régime d’écoulement monophasique supercritique pour les forts flux de chaleur. L’apparition de ce dernier régime n’est pas surprenante car le système fonctionne en boucle fermée et non à pression constante. La capacité de refroidissement d’un tel système est assez grande puisque les coefficients de transferts de chaleur varient de 1 à 10 kW.m-2.K-1.
Microcanaux (2 mm x 10 µm) creusés dans un substrat de Pyrex. En bas : réservoir d’hélium équipé d’un chauffeur (fil en tire-bouchon) et de capteurs de température miniatures. En haut (couleur verte) : sortie des canaux dans le bain d’hélium superfluide.
Transferts de chaleur en hélium superfluide à travers des microcanaux
Pour les aimants supraconducteurs d'accélérateur refroidis par de l’hélium superfluide (T < 2,2 K), les isolations électriques des conducteurs constituent la plus grande barrière thermique au refroidissement. Les isolations des aimants en NbTi peuvent être composées d'un enrubannage de rubans isolants en polymère créant des micro-canaux ayant des dimensions caractéristiques de l'ordre de 10 à 100 μm. La compréhension des phénomènes thermiques dans l’hélium superfluide à ce niveau de confinement est nécessaire pour l’optimisation du refroidissement de ces aimants. Afin d’étudier ces transferts thermiques, des microcanaux ont été creusés chimiquement dans des substrats de Pyrex. Une différence de température, mesurée avec des capteurs miniatures, est créée entre un réservoir d’hélium superfluide et la sortie des canaux à l’aide d’un chauffeur. Ces mesures sont comparées aux modèles de transfert de chaleur connus dans l’hélium superfluide. On retrouve le régime de Gorter-Mellink pour des canaux de grandes dimensions (100 µm de diamètre équivalent) et le régime de Landau pour des dimensions plus petites (17 µm x 75 µm et 16 µm x 24 µm). Les prochaines études se focaliseront sur des dimensions proches du micron.
• Physique et technologie des aimants supraconducteurs › Instrumentations et développements pour les aimants de recherche
• Le Département des accélérateurs, de cryogénie et de magnétisme (DACM)
• Laboratoire de cryogénie et des stations d’essais (LCSE) • Laboratoire d'’études des aimants supraconducteurs (Léas)