Une équipe du Département d'Astrophysique, en collaboration avec la compagnie privée Iris.AI, a montré pour la première fois que l'on pouvait trouver dans des études de biologie des informations pertinentes pour mieux comprendre le milieu interstellaire. Ces résultats paraîtront bientôt dans le Journal of Interdisciplinary Methodologies and Issues in Science.
Le but de cette étude était d'explorer l'énigme des Bandes Diffuses Interstellaires (DIBs), une forêt de centaines de bandes en absorption dans le domaine visible, dont l'origine est encore inconnue, exactement un siècle après leur découverte en 1922. Ces bandes sont présentes dès que l'on observe un spectre stellaire. Quelques années après leur découverte, les astrophysiciens avaient compris que leur origine était interstellaire, car leur intensité est corrélée avec l'extinction par la poussière le long de la ligne de visée et indépendante des caractéristiques stellaires. Il est maintenant acquis que les DIBs doivent être portés par des molécules organiques d'une centaine d'atomes, main on ignore lesquelles. L'équipe pluridisciplinaire, constituée d'astrophysiciens et de développeurs d'outils de linguistique informatique de la compagnie Iris.AI, a mis en œuvre la technique de Traitement Automatique du Langage (TAL), l'une des branches de l'apprentissage statistique qui s'applique à l'analyse de textes écrits. Ils ont développé une intelligence artificielle qui a lu 1,5 millions d'articles scientifiques de tous les domaines, et s'est spécialisée en lisant le millier d'articles traitant des DIBs.
Cette intelligence artificielle a ainsi mis en évidence une douzaine de publications, toutes en biologie, mesurant des transitions de molécules dont un grand nombre de raies correspondent à des DIBs. Ces études se répartissent en deux catégories. Une première série porte sur l'étude des pigments visuels de divers animaux, dont la chimère éléphant, le dauphin et certains papillons. Les transitions observées de ces pigments proviennent toutes de chromophores, une famille de groupements moléculaires organiques. La deuxième catégorie concerne la molécule d'hème (qui est à la base de l'hémoglobine) ou ses dérivés. Il se trouve que l'existence dans le milieu interstellaire de ces deux classes de molécules a été suggérée de manière indépendante dans la littérature, mais le rapprochement avec les DIBs n'avait pas été fait.
Ces résultats ouvrent donc des pistes de travail pour isoler et étudier ces familles de molécules en laboratoire. Grâce à cette preuve de concept, la collaboration va maintenant perfectionner le code et explorer une plus grande base de données bibiographiques. Ces premières études démontrent aussi la pertinence du TAL pour croiser des informations interdisciplinaires afin de proposer de nouvelles pistes de recherche, une méthode qui est appelée à prendre de l'importance avec le développement de l'intelligence artificielle.
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