Si, en dessous de 10 keV, la technique de focalisation du rayonnement utilisée depuis plusieurs décennies a permis la construction de véritables télescopes à forte résolution angulaire et sensibilité, tels que le télescope européen X XMM-Newton, ce n'est pas le cas aux énergies plus élevées. En effet, dans le domaine des X durs (>10 keV), les images du ciel ne peuvent être obtenues aujourd'hui qu'en utilisant la technique dite des masques codés, comme c'est le cas pour l'observatoire européen de rayonnement gamma INTEGRAL. Cette méthode d'imagerie reste néanmoins intrinsèquement inférieure de plusieurs ordres de grandeur en résolution angulaire et en sensibilité à celles des télescopes " X ". Cette transition extrêmement forte dans les capacités instrumentales autour de 10 keV a deux conséquences importantes. D'une part, la sensibilité de détection autour de cette énergie charnière confine les observations aux objets les plus brillants. Cette contrainte ne permet pas, entre autres, de déterminer l'énergie maximale à laquelle émettent les objets vus à plus basse énergie. Cette information est essentielle pour interpréter correctement l'origine de l'émission non thermique. D'autre part, la finesse d'image des masques codés est très souvent insuffisante pour associer sans ambiguïté aux sources gamma leur contrepartie à plus basse énergie (X, optique, infrarouge ou radio), rendant difficile voire impossible la détermination de leur nature.
Les deux techniques d'imagerie actuellement employées à haute énergie. Le télescope XMM-Newton utilise une optique focalisatrice dans le domaine d'énergie de 0.1 à 10 keV (longueur focale de 7.5 mètres). L'observatoire INTEGRAL utilise la technique des masques codés dans la gamme d'énergie de 15 keV à 10 MeV.
De façon similaire à ce qui est fait dans la mission XMM-Newton, Simbol-X focalise le rayonnement X à l'aide d'une optique à miroirs attaqués en incidence rasante (voir figure ci-dessous). C'est en effet dans cette seule configuration, opposée à celle en vigueur dans les longueurs d'onde moins énergétiques, que le rayonnement X peut être réfléchi sur une surface, de la même façon qu'un galet ne peut rebondir sur un lac que si sa trajectoire est quasiment parallèle à la surface du lac. Les optiques ainsi conçues, en particulier celles utilisées dans XMM-Newton et Simbol-X (configuration dite Wolter I), sont caractérisées par une longueur focale inversement proportionnelle à l'énergie maximale qu'elles seront capables de focaliser. Pour pouvoir atteindre le domaine des X durs, Simbol-X s'appuie ainsi sur une longueur focale de 20 mètres, soit près de trois fois celle de XMM-Newton. Cette contrainte implique que le miroir et le plan focal soient découplés. Ces deux modules sont donc séparés et chacun portés par un satellite. Le principe de focalisation des rayons-X et cette innovante configuration de satellite, appelée vol en formation, sont respectivement illustrés par les deux schémas ci-dessous.
A gauche : Principe d'une optique à rayons X en configuration de Wolter I. Elle combine deux surfaces de révolution aux formes paraboliques et hyperboliques sur lesquelles les photons sont réfléchis en incidence rasante. Une image du ciel est ainsi formée au plan focal sur lequel se concentre le rayonnement incident.
A droite : Vol en formation. Le module contenant le miroir (a) est découplé du satellite abritant le plan de détection (b). Les photons incidents sont focalisés sur les détecteurs constituant le plan focal. Les deux modules sont séparés entre eux de 20 mètres et la précision de positionnement requise à chaque instant est de 1 cm.
L'observation des sources astrophysiques de haute énergie nécessite de viser ces objets pendant des temps extrêmement longs, typiquement une dizaine d'heures. Durant une observation, le satellite miroir doit rester pointé dans la même direction du ciel et le satellite détecteur positionné à distance constante sur l'axe optique du miroir. Si la première condition est facile à réaliser de façon classique, comme dans toutes les missions d'astronomie pointées, la seconde représente un défi technologique. La force de gravitation tend en effet à séparer les deux satellites lorsqu'ils sont en orbite autour de la terre. Aussi, l'orbite du satellite détecteur doit-elle être asservie en permanence sur celle du satellite miroir, par un système combinant des mesures de position précises et des moteurs de propulsion adéquats.
Dans le cas de Simbol-X, l'orbite choisie par les ingénieurs est une orbite très excentrique autour de la terre, allant de 20000 kilomètres pour son point le plus proche (périgée) à 180000 kilomètres pour son point le plus éloigné (apogée). Sa période est de quatre jours. Il est requis que la position relative des satellites reste constante à un centimètre près. Une étude détaillée réalisée par le CNES a démontré que cette configuration de vol et ses contraintes sont technologiquement réalisables avec l'instrumentation de miroirs et de détecteurs nécessaire à Simbol-X.