On perçoit la synthèse d'un élément superlourd en deux étapes critiques : la formation d'un noyau composé par fusion complète des deux noyaux initiaux, puis la survie de ce noyau composé.
Dans la première étape, la fusion est en compétition avec la quasifission où les deux noyaux se séparent avant fusion totale. Après fusion, le noyau composé fissionne la plupart du temps. Cette fusion-fission est expérimentalement difficile à distinguer de la quasifission. La différence majeure est liée au temps de ces deux mécanismes: le premier est lent (>10-18 s) alors que le second est plus rapide (<10-20 s).
Finol (fission des noyaux lourds) est une expérience destinée à mesurer directement les temps de fusion-fission/quasifission des éléments transuraniens de façon à déterminer la proportion de noyaux qui fusionnent effectivement et donc l'efficacité de la première étape de la synthèse.
Localisation L'expérience utilise des faisceaux d'ions lourds de basse énergie produits par le cyclotron CSS1 du Ganil.
Collaboration Ganil, CNRS/IN2P3(IPN-Orsay, IPN-Lyon, GPS-Jussieu)
Moyens d'investigation Mesure du temps de vie du noyau composé vis-à-vis de la fission par la mesure de son temps de parcours à l'intérieur d'un canal formé par les rangées d'atomes d'une cible monocristalline.
Un faisceau d'uranium de 6.62 MeV/nucléon bombarde une cible monocristalline de 58Ni. Lors d'une réaction de fusion, le noyau de recul parcourt une certaine distance avant de se désintégrer. Si la désintégration se produit au centre d'un canal, le fragment de fission émis dans la direction du canal ne subit aucune déviation (champ électrique nul). Par contre, si le noyau se désintègre près d'une rangée cristalline, le fragment est soumis à un champ électrique très intense qui modifie sa trajectoire et l'on observe un dépeuplement dans la direction du canal. Donc en mesurant la distribution angulaire autour d'un axe du cristal, il est possible de déterminer la durée de vie du noyau composé avant fission.
Dans les conditions expérimentales, les temps accessibles sont compris entre 10-19 et 10-16 s.
Instruments La cible monocristalline montée sur un goniomètre avec trois axes de rotation permettant une orientation précise du cristal est installée à l'intérieur du détecteur 4π de particules chargées Iindra. Six cellules de détection d'INDRA ont été remplacées par trois télescopes à haute résolution constitués chacun d'une chambre d'ionisation de 6cm d'épaisseur (gas, CF4 à 40mb) suivie d'un détecteur Silicium à couche résistive permettant une localisation en x et y. L'un des téléscopes est positionné à 11° par rapport à l'axe du faisceau. Il est utilisé pour contrôler la qualité du cristal pendant l'expérience par la mesure de la diffusion élastique. Les deux autres télescopes sont positionnés à 20° du faisceau selon deux axes du cristal.
Spécificités
Responsabilités scientifiques et techniques
Co-porte-parole de l'expérience.
Conception et réalisation de cinq chambres d'ionisation à haute résolution par le SIS et le Sédi.
Participation à l'expérience, au dépouillement et à l'analyse des données.
Dates importantes
Etat au 1 octobre 2007
Perspectives
L'objectif est de terminer les calibrations en numéros atomiques et énergies pour les expériences Z=114 et Z=124. Les analyses des mécanismes de réaction semblent prometteuses. Des simulations doivent permettre de comprendre plus précisément les formes des creux de blocking pour Z=124.
Bilan scientifique et technique
Nous avons montré qu'il existe des temps de fission significativement longs pour les noyaux composés Z=120 et 124. Cela signe la présence d'effets de couches importants qui formeraient l'îlot de stabilité des noyaux superlourds. Par contre, ces temps de vie longs sont bien moins présents pour le noyau composé Z=114: les barrières de fission pour de tels noyaux doivent être bien plus faibles.
En juin-juillet 2005, nous avons réalisé la suite de l'expérience E416. Le montage expérimental est identique. Cette fois-ci un mono-cristal de germanium a été bombardé par des faisceaux d'Uranium et de Plomb, de façon à étudier la fission des noyaux composés Z=124 et Z=114 respectivement. Les résultats nous permettront de comparer les temps de fission pour ces nombres de proton différents, et ainsi d'en tirer des indices sur la localisation de l'îlot de stabilité des noyaux superlourds.
Faits marquants
Pour la première fois, nous avons pu montrer la formation d'un noyau composé de Z=120.
Contact
A. Drouart & al.,
Evidence of Z=120 compound nucleus formation from lifetime measurement in the 238U+Ni reaction at 6.62 MeV/nucleon
Exotic Nuclei - International Symposium on Exotic Nuclei (EXON 2004), Peterhof : Russian Federation (2005).
M. Morjean
AIP Conference Proceedings -- November 7, 2005 -- Volume 798, pp. 194-204
NUCLEAR FISSION AND FISSION-PRODUCT SPECTROSCOPY: 3rd International Workshop on Nuclear Fission and Fission-Product Spectroscopy
D. Jacquet & al.,
Long-lived Super-Heavy Elements Evidenced Through Fission Time Measurements
AIP Conference Proceedings -- August 14, 2006 -- Volume 853, pp. 239-244
FUSION06: Reaction Mechanisms and Nuclear Structure at the Coulomb Barrier
Morjean & al.,
Direct experimental evidence for very long fission times of super-heavy elements
The European Physical Journal D - Atomic, Molecular, Optical and Plasma PhysicsVolume 45, Number 1 / octobre 2007M.